L’artiste revient sur le déroulement des évènements qui conduit à sa garde à vue en début de semaine.
Vous-êtes arrêté dans l’après-midi de lundi 29 octobre, qu’est-ce qu’on vous reproche?
D’abord, j’ai reçu un appel anonyme lundi vers midi. Mon interlocuteur m’a fait comprendre qu’il veut se procurer le Cd de album « population gay kor », tout en me demandant si je suis à la maison. Dix minutes plus tard, des policiers débarquent chez nous et demandent à voir N2A. Je me suis présenté et ils m’ont fait comprendre qu’ils sont de la police judiciaire. Ils m’ont tendu un mandat de perquisition dont le motif n’était d’ailleurs pas bien lisible. Pendant la fouille, ils ont ramassé tous les supports de mon concept « population gay koor », qu’il s’agisse des t-shirts ou d’autres objets. Malheureusement pour eux, ils n’ont pas pu mettre la main sur les Cd. Ils m’ont ensuite demandé de venir avec eux.
Où-est-ce qu’on vous a amené ?
A la coordination de la police judiciaire où l’un des policiers m’a demandé est-ce bien moi qui a chanté « population Gay gay kor ». Je lui ai dit que c’est bien moi et que c’est un concept que j’ai créé. Ensuite, un colonel à côté m’a dit: « tu as chanté ‘’population gay koor seï, alyom, acoumabasmakoor (tu as chanté population cri n’est-ce pas, aujourd’hui les autorités ont entendu le cri). Mon avocat s’est porté garant et il leur a demandé de me laisser rentrer mais ils n’ont pas accepté. Le colonel a vociféré sur mon avocat et lui a demandé s’il souhaite qu’on le renvoie de son travail ? Il nous a fait comprendre qu’il a reçu des ordres de ses chefs hiérarchiques et qu’il ne peut pas me libérer. C’est ainsi qu’on m’a gardé et mardi matin ils m’ont conduit devant le procureur de la République.
De quoi vous reproche-t-on ?
On me reproche d’avoir incité la population à la révolte à travers ma chanson « population gay koor ». Le juge m’a demandé si je reconnais les faits qui me sont reprochés notamment l’incitation à la révolte et à la haine. Je lui ai dit que je ne suis qu’un artiste qui porte haut la voix de ces milliers de tchadiens qui peinent à trouver de quoi mettre sous la dent. Je n’ai fait que plaider leur sort, ils n’ont pas la chance d’exprimer haut ce qu’ils subissent. Le juge a classé le dossier sans suite et on a ordonné ma libération.
Quel est votre sentiment après cette expérience?
En toute sincérité, si les plus hautes autorités ont écouté ma musique et qu’ils me font arrêter aujourd’hui, c’est qu’elles ont écouté le cri de cette population qu’elles font comprendre au monde entier qu’elle vit bien. Ce qui reste à faire, c’est de prendre en compte ce cri et essayer d’améliorer la situation des Tchadiens. Cette arrestation renforce ma conviction et me rend plutôt fort. J’ai appris une chose à travers cette arrestation, c’est que quand vous vous réunissez, vous-êtes plus forts. La mobilisation de mes confrères artistes, des avocats et des journalistes en est la preuve.
Quel est votre état d’esprit pour votre concert demain ?
Fatigué mais plus que jamais fort. Le moral n’est pas atteint et j’espère mettre le feu demain. Nous aurons tellement des choses à nous dire lors de ce concert. Demain, nous allons crier pour qu’on nous entende.