Recours au 49-3: les précédents depuis le gouvernement Rocard

L’article 49-3 de la Constitution, dont s’est saisi samedi Edouard Philippe pour faire adopter la réforme des retraites, a été utilisé par de nombreux Premiers ministres depuis Michel Rocard, champion en la matière.

Jean-Marc Ayrault (2012-2014) et François Fillon (2007-2012) n’y ont cependant jamais eu recours. De même, Lionel Jospin (1997-2002), durant la cohabitation avec Jacques Chirac, n’a jamais fait appel à cette disposition qui permet de faire adopter sans vote un projet de loi, si aucune motion de censure n’est votée contre le gouvernement par l’Assemblée nationale.

Dans la plupart des cas où l’article 49-3 a été utilisé, l’opposition a déposé une motion de censure, à chaque fois rejetée.

– Michel Rocard (mai 1988-mai 1991)

Faute de majorité absolue au Parlement, Michel Rocard engage à 28 reprises sa responsabilité via l’article 49-3 au début du second septennat de François Mitterrand. Quinze textes sont ainsi adoptés, notamment la loi créant le Conseil supérieur de l’audiovisuel, la réforme du statut de la Régie Renault et la loi de programmation militaire 1990-1993.

– Edith Cresson (mai 1991-avril 1992) –

Elle fait usage à huit reprises du 49-3, pour faire passer en force quatre projets de loi, dont le budget 1992 et la création de l’Agence du médicament.

– Pierre Bérégovoy (avril 1992-mars 1993) –

Le dernier Premier ministre socialiste de François Mitterrand utilise trois fois l’article, sur la maîtrise des dépenses de santé, le budget 1993, le Fonds de solidarité vieillesse.

– Edouard Balladur (mars 1993-mai 1995) –

Disposant d’une majorité écrasante à l’Assemblée nationale, durant la seconde cohabitation entre la droite et François Mitterrand, il ne dégaine l’article 49-3 qu’une seule fois, sur les privatisations d’entreprises publiques, pour couper court à « l’obstruction parlementaire » menée, selon lui, par l’opposition, qui a déposé quelque 3.800 amendements.

– Alain Juppé (mai 1995-juin 1997) –

Le Premier ministre de Jacques Chirac a recours à deux reprises à l’article 49-3: en décembre 1995 pour faire passer le projet de loi l’autorisant à légiférer par ordonnances pour réformer la protection sociale, puis en juin 1996 pour faire adopter le projet de loi sur le statut de France Télécom, avant la fin de la session parlementaire.

– Jean-Pierre Raffarin (mai 2002-mai 2005) –

Premier ministre après la réélection de Jacques Chirac, il s’est saisi deux fois de l’article 49-3. Alors que la gauche et l’UDF ont déposé quelque 13.000 amendements sur sa réforme des modes de scrutin régional et européen, il décide une première fois le 15 février 2003 d’engager la responsabilité de son gouvernement.

Le 27 juillet 2004, M. Raffarin utilise à nouveau le 49-3 pour le projet de loi relatif aux libertés et responsabilités locales qui favorise la décentralisation.

– Dominique de Villepin (mai 2005 – mai 2007) –

Le 9 février 2006, Dominique de Villepin utilise le 49-3 pour faire passer le projet de loi pour l’égalité des chances, qui inclut le très contesté Contrat première embauche (CPE). Le projet de loi sera adopté, mais la mobilisation massive de la rue finira par signer la mort du CPE, qui sera abrogé.

– Manuel Valls (mars 2014 – décembre 2016) –

Le 17 février 2015, Manuel Valls utilise le 49-3 pour faire passer en première lecture le projet de loi d’Emmanuel Macron, alors ministre de l’Economie, « pour la croissance et l’activité », face à l’opposition attendue de députés PS, hostiles notamment à l’extension de l’ouverture des commerces le dimanche.

Une motion de censure déposée par l’UMP et l’UDI est rejetée.

Les 16 juin et 9 juillet, nouveaux recours au 49-3 pour le même texte, sans motion de censure dans le second cas. Le texte sera définitivement adopté.

Le 10 mai 2016, M. Valls utilise à nouveau le 49-3 pour l’adoption sans vote en première lecture de la loi travail défendue par Myriam El Khomri, ce qui pousse 56 députés de la majorité à tenter en vain de déposer une inédite motion de censure contre le gouvernement – il leur manque deux voix. Celle déposée par la droite est retoquée le 12 mai.

Le 5 juillet, le Premier ministre engage de nouveau la responsabilité de son gouvernement.

Le 20 juillet, il déclenche un troisième et ultime 49-3 pour l’adoption définitive, et sans vote, du projet de loi travail.

Retraites: treize jours hors norme à l’Assemblée en cinq actes

Une guérilla parlementaire féroce, des tensions, quelques dérapages et un coup de tonnerre surprise avec l’annonce du 49-3: le parcours hors norme de la réforme des retraites à l’Assemblée en V actes.

Acte I – L’ouverture

Après des semaines de contestation dans la rue, le marathon démarre dans l’hémicycle le lundi 17 février dans une atmosphère déjà électrique. Contestée par toutes les oppositions, la réforme qui vise à créer un système « universel » de retraite par points n’a pas pu être examinée intégralement en commission, fait inédit, pour cause d’avalanche d’amendements des Insoumis.

Pour la séance, 41.000 amendements sont déposés (pour l’essentiel par la gauche de la gauche). LFI assume l' »obstruction » et promet de tenir « la tranchée », le PCF dénonce un projet « monstrueux ».

Quinze jours de débats sont programmés, le gouvernement tablant sur une adoption en première lecture avant les municipales et un feu vert définitif « d’ici l’été ».

Mais déjà des « marcheurs » préviennent en coulisse qu’ils n’excluent pas un 49-3 (adoption sans vote) si le débat est « clairement impossible ».

Acte II – Le bras de fer commence

Le président de l’Assemblée Richard Ferrand (LREM) tente dès le mardi de cadrer les discussions en s’appuyant sur le règlement interne, avec notamment un seul orateur sur les amendements identiques. Une troisième semaine de débat est annoncée, week-end compris.

Dans l’hémicycle, de nouvelles tensions émergent : les communistes attaquent les « marcheurs », leur reprochant d' »insulter la mémoire » de leur camp. « Vous auriez été beau dans la Résistance! », lance le secrétaire national du PCF Fabien Roussel.

Les rappels au règlement et suspensions de séance en série commencent, émaillés d’invectives, et le début de l’examen des premiers amendements est poussif. La majorité se dit « consternée » et plaide pour « un vrai débat ».

Acte III – L’enlisement

Dès le troisième jour, les débats virent au blocage. Les rappels au règlement s’enchaînent encore dans une atmosphère houleuse.

Richard Ferrand prévient que faute de changement de rythme, il faudrait 150 jours pour arriver au bout du texte.

Des élus de la majorité disent leur « honte » que l’Assemblée « se transforme en cirque ».

« Chenil », « tyrannie », « petites connes »…., le ton monte aussi sur le web entre certains députés, avec des répercussions jusque dans l’hémicycle.

Dans le brouhaha, les élus LR, qui veulent incarner une « troisième voie » entre la gauche et la majorité, plaident pour que le fonctionnement de l’Assemblée ne soit pas bloqué « par une partie de ping-pong ».

Acte IV – Dans l’oeil du cyclone

Les échanges commencent à tourner en boucle, toujours sur l’article 1er consacré aux « principes généraux » de la réforme, certains évoquant « un jour sans fin ».

Le secrétaire d’État Laurent Pietraszewski, au banc depuis le départ, se dit « pantois » de ce débat « sur des mots ». Il faudra six jours pour voir adopté un premier amendement et huit jours d’un impossible dialogue pour passer le cap de l’article 1.

Au 9e jour, Edouard Philippe demande aux députés LREM de « tenir », mais laisse ouverte la possibilité du 49-3.

Dans la soirée, la majorité déserte momentanément l’hémicycle pour protester contre « l’obstruction » – une « mise en scène » pour les oppositions. Après leur retour, le co-rapporteur Nicolas Turquois (MoDem) met le feu aux poudres en lançant: « vous n’êtes rien »… s’excusant par la suite.

Tout le monde a en tête un déclenchement imminent du 49-3, et le jeu du mistigri a démarré: la majorité accuse la gauche de la gauche de vouloir l’y « emmener » par l’obstruction, LFI affirme que les « marcheurs » le « préparent » en surjouant « l’indignation ».

Personne ne voulant en porter le chapeau, c’est ensuite le rétropédalage général: la gauche de la gauche joue la carte du débat de fond, la majorité leur demande de retirer des amendements pour avancer.

Les débats avancent cahin-caha, entre accusations mutuelles de « déni de démocratie » et quelques sous « remis dans le jackpot » par les uns et les autres.

Acte V – Le coup de théâtre

Dans un hémicycle dégarni pour le deuxième week-end consécutif, l’Assemblée vote dans la matinée l’application de la réforme aux régimes spéciaux, un point sensible.

Dans les couloirs, le bruit commence à monter de l’arrivée du Premier ministre. Après une suspension de séance, Edouard Philippe fait l’annonce surprise du recours au 49-3 après 115H d’échanges, afin de « mettre fin à cet épisode de non-débat ».

Motion de censure: une procédure fréquente, une seule fois avec succès

Plus de 100 motions de censure ont été déposées depuis 1958, à l’instar de celles déposées par la droite et la gauche sur la réforme des retraites, mais une seule a été adoptée, en 1962, qui avait fait chuter le gouvernement de Georges Pompidou.

Une motion peut être déposée de façon spontanée par les députés pour censurer la politique d’un gouvernement (art 49-2), comme ce fut le cas, avec succès, dans la nuit du 4 au 5 octobre 1962, ou en vain à de nombreuses autres reprises.

Elle peut aussi être utilisée en réaction à l’engagement de la responsabilité du gouvernement sur un texte (art 49-3), comme ce samedi par le Premier ministre Edouard Philippe.

Aucune motion de censure déposée suite à un 49-3 n’a été adoptée depuis la naissance de la Ve République en 1958.

Le dépôt de deux motions de censure simultanées n’est pas sans précédent sous la Ve République, le dernier cas remontant à l’été 2018 lors de l’affaire Benalla.

En 1979 et 1980, socialistes et communistes avaient ainsi déposé plusieurs motions parallèles contre le gouvernement Raymond Barre, visant les projets de loi de Finances. Les votes sont dans ce cas séparés, ce qui implique qu’un député peut théoriquement apporter sa voix à deux motions.

En 1962, la motion de censure des opposants au projet d’élection du président de la République au suffrage universel est déposée par le centre, les socialistes et la droite non gaulliste. Elle est adoptée le vendredi 5 à 04H40 du matin par 280 députés sur 480.

Le 6 octobre, Georges Pompidou remet la démission de son gouvernement au général de Gaulle, qui le prie de rester provisoirement en fonction puis dissout l’Assemblée nationale. Le « oui » à l’élection présidentielle au suffrage universel l’emporte largement lors d’un référendum le 28 octobre, et les gaullistes remportent les élections législatives un mois plus tard. Pompidou est alors confirmé à son poste par le président de la République.

Emmanuel Macron et le 49-3, un passif

Emmanuel Macron peut garder un souvenir amer du 49-3, dégainé samedi pour la réforme des retraites : sous le quinquennat Hollande, Manuel Valls avait imposé cette arme constitutionnelle à celui alors ministre de l’Economie pour faire passer sa loi croissance.

Au bout de douze jours de débats, l’Assemblée nationale était venue à bout des quelque 300 articles du projet de loi, dont Richard Ferrand, alors de l’aile gauche du PS, était le rapporteur général.

Mardi 17 février 2015 au matin, les 30 à 40 socialistes « frondeurs », emmenés par Christian Paul et Laurent Baumel, annoncent qu’ils vont majoritairement voter contre ce texte allant de l’extension du travail du dimanche à la libéralisation du transport en autocars.

Les quelques voix de centristes ou de très rares UMP (devenus LR) risquent de ne pas suffire pour faire voter en première lecture ce projet de loi emblématique de la ligne réformatrice de l’exécutif. Les abstentions de certains élus de droite, mises en avant par le cabinet d’Emmanuel Macron, ne sont pas « fiables », juge-t-on aussi à Matignon.

« Au moment où je parle le texte ne passe pas », déclare peu après le chef du gouvernement devant les députés PS réunis à huis clos. Un Conseil des ministres est convoqué en urgence à l’Elysée à 14H30, dont rien ne filtre.

Manuel Valls, mine grave, laisse encore planer le doute lors de la séance des questions au gouvernement. « Le gouvernement fera tout pour que cette loi passe parce qu’elle est utile pour le pays », martèle-t-il en réponse au patron des députés UMP Christian Jacob l’accusant de recourir au 49-3 dans « l’urgence et la panique ».

Pendant la pause avant la séance supposée du vote, on compte et recompte. Il y avait même trois comptages à confronter : celui du groupe PS, celui de Matignon, et celui du cabinet d’Emmanuel Macron.

« Là, il y a une hypothèse que ça passe de 5-6 voix, mais dans une configuration hyper idéale, sans accident. Or, 2-3 accidents lors d’un vote c’est très vite arrivé. Donc on dit qu’on ne prend pas le risque », relate un ancien conseiller ministériel à l’AFP. « Et devant nous, Valls appelle le président et demande l’autorisation » d’engager la responsabilité du gouvernement.

– « Acte d’autorité » –

Le locataire de Matignon annonce à la tribune le recours au 49-3, au nez et à la barbe d’Emmanuel Macron, qui espérait faire passer « sa » loi par sa seule force de conviction.

« La réalité c’est que Macron était minoritaire, mais aussi à cause de gens (les frondeurs) qui ont employé des méthodes détestables, des gauchos », lâche un ex-membre du gouvernement Valls.

L’outil constitutionnel permettant un passage en force a amplifié l’image clivante du jeune ministre. Il sera utilisé à nouveau à deux reprises, jusqu’à l’adoption définitive en juillet 2015 de sa loi « pour l’activité, la croissance et l’égalité des chances économiques ».

Manuel Valls s’est ensuite défendu devant des journalistes d’avoir imposé le 49-3 pour tacler Emmanuel Macron, à la popularité grandissante. Ce n’est aucunement « un plaisir d’engager un 49-3 » mais « c’est aussi faire acte d’autorité et permettait d’expliquer à Emmanuel Macron qui disait qu’il était le meilleur ministre du monde, qu’à la fin il n’y a pas de majorité », reconnaît un ancien conseiller. « Ça permettait aussi de dire +mon gars reste à ta place+ ».

L’épisode a laissé « une marque indélébile », juge un député LREM. « L’effet Valls est ultra important » : le dégainer est synonyme de « violence, brutalité ».

Retraites: les principaux points de la réforme, après le 49-3

Un nouveau système de retraite « universel » et par points, avec un « âge d’équilibre » très controversé: voici les principaux points de la réforme, dans la version modifiée sur laquelle le gouvernement a engagé le 49-3.

Il a retenu des amendements adoptés par l’Assemblée ainsi que des mesures issues des discussions avec les partenaires sociaux.

« Universel »

Le futur système couvrira « l’ensemble des personnes travaillant en France, sans exception »: salariés du privé et des régimes spéciaux, fonctionnaires, magistrats, militaires, agriculteurs, travailleurs indépendants…

Tous les actifs nés à partir de 1975 cotiseront à une nouvelle « Caisse nationale de retraite universelle » qui chapeautera les 42 régimes existants – avant, peut-être, de les absorber.

Les députés ont symboliquement acté la future hausse des salaires des enseignants, en isolant dans un article spécifique du projet de loi cette « garantie », qui devra être concrétisée dans une loi de programmation à venir.

Pour répondre notamment à la grogne des avocats, le texte prévoit un abattement de 30% sur l’assiette des cotisations sociales des professions indépendantes, et un « dispositif de solidarité » pour soutenir les « petits cabinets ».

Et la transition pour les indépendants durera 20 ans et non 15 ans comme prévu initialement.

Le texte inscrit « en dur » une des ordonnances sur le « droit à l’information » des retraités, les oppositions critiquant de façon récurrente la trentaine d’ordonnances programmées.

Par points

Le montant de la retraite dépendra du nombre de points accumulés « tout au long de la carrière professionnelle » et non plus de la durée de cotisation (en trimestres) et du salaire de référence (25 meilleures années dans le privé, 6 derniers mois dans le public).

Unité de compte fondamentale du futur système, le point aura une « valeur d’acquisition » (durant la carrière) et une « valeur de service » (pour le calcul de la pension), qui ne pourront pas baisser, ni augmenter moins vite que l’inflation.

La valeur du point sera calculée à l’aide d’un « nouvel indicateur » de l’Insee sur « l’évolution du revenu moyen d’activité par tête », la gauche critiquant un « amateurisme coupable » en fondant un modèle sur « un indicateur qui n’existe pas » à ce jour.

Autre sujet sensible, la prise en compte de la pénibilité de certaines professions, sur laquelle les discussions avec les partenaires sociaux n’ont pas encore abouti.

Le gouvernement prévoit toutefois dans le texte de généraliser la visite médicale à 55 ans pour les travailleurs exposés à des facteurs des pénibilité et veut améliorer les modalités d’acquisition des points, dans le cadre du compte professionnel de prévention, pour les travailleurs exposés à plusieurs facteurs de risques professionnels.

Le projet de loi intègre aussi un « congé de reconversion » pour les personnes soumises à la pénibilité, pouvant aller jusqu’à six mois.

Age d’équilibre

L’âge légal de départ restera maintenu à 62 ans (ou moins pour certaines professions), mais il faudra « travailler un peu plus longtemps » pour toucher une retraite à taux plein.

Un « âge d’équilibre », assorti d’un « mécanisme de bonus-malus » de 5% par an, aura ainsi pour objectif « d’inciter les Français à partir plus tard avec une meilleure pension ».

Dans un premier temps, le gouvernement envisageait son entrée en vigueur dès 2022, pour le porter progressivement à 64 ans en 2027. Face à l’opposition des syndicats, cette « mesure de court terme » a été retirée du projet de loi, une « conférence des financeurs » devant proposer d’ici fin avril d’autres moyens « d’atteindre l’équilibre financier ».

Départs anticipés

Les fonctionnaires exerçant certaines « fonctions régaliennes » (policiers, douaniers, surveillants pénitentiaires, contrôleurs aériens) pourront toujours partir en retraite à 57, voire 52 ans. Idem pour les militaires, qui garderont le droit de toucher une pension après 17 ou 27 années de « services effectifs ».

Pour les autres fonctionnaires des « catégories actives » et les salariés des régimes spéciaux, l’âge légal sera progressivement relevé à 62 ans, mais l’extension du « compte pénibilité » et de la retraite pour incapacité permanente déjà en vigueur dans le secteur privé permettra à certains de cesser le travail à 60 ans.

Le gouvernement a également repris un amendement communiste sur les égoutiers. Ceux recrutés avant le 1er janvier 2022 pourront partir à 52 ans.

Dans la fonction publique hospitalière, les fonctionnaires ayant opté pour leur maintien dans la catégorie B pourront continuer à partir à 57 ans.

Fins de carrière

La retraite progressive, qui permet de toucher une partie de sa pension en continuant de travailler à temps partiel, sera étendue aux salariés en forfait-jours, aux régimes spéciaux et aux agriculteurs.

Les règles du cumul emploi-retraite seront modifiées pour que ceux qui touchent une pension à taux plein puissent engranger des points supplémentaires quand ils reprennent une activité.

Pension minimum

Les futurs retraités « ayant effectué une carrière complète » recevront si nécessaire « des points supplémentaires » afin que leur pension atteigne 1.000 euros net en 2022, puis 83% du Smic net en 2023, 84% en 2024 et 85% en 2025.

Droits familiaux

Chaque enfant donnera droit à « une majoration en points de 5% », dont la moitié sera attribué à la mère au titre de la maternité. L’autre moitié pourra être partagée entre les deux parents ou attribuée à l’un ou l’autre.

Un bonus supplémentaire de 2% sera accordé pour le troisième enfant et réparti à parts égales entre le père et la mère, à moins qu’ils en décident autrement.

Des points supplémentaires seront attribués aux parents isolés.

Droits conjugaux

La pension de réversion garantira au conjoint survivant, à partir de 55 ans et après au moins deux ans de mariage, « 70% des points de retraite acquis par le couple ».

Ces règles ne s’appliqueront toutefois « qu’à partir de 2037 », pour les personnes ayant intégré le système universel.

Le gouvernement assure que les personnes divorcées pourront bénéficier d’un pourcentage de pension de réversion de leurs ex-conjoints décédés.

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Incidents en marge du concert d’une star congolaise à Paris: 51 gardes à vue samedi

Le parquet de Paris a indiqué à l’AFP que « 51 gardes à vue étaient en cours samedi matin » suite aux manifestations et aux incendies intervenus vendredi gare de Lyon à Paris en marge du concert de la star congolaise Fally Ipupa.

Le chanteur de rumba congolaise, accusé d’être proche du pouvoir en place en République démocratique du Congo (RDC), ne s’était pas produit en France depuis des années, par peur de débordements. Avant le début de son concert à l’AccorHotels Arena, de multiples incidents ont éclaté vendredi en début de soirée aux abords de la gare et du quartier proche de Bercy.

Plusieurs scooters et poubelles ont été incendiés, dégageant d’épaisses volutes de fumée dans la zone. Envahie par les fumées, la partie souterraine de la gare a été évacuée par précaution et le trafic des métros et RER a été perturbé.

Vers 18H30, les feux ont été maîtrisés par les pompiers et une trentaine de véhicules, surtout des deux-roues, entièrement carbonisés, avait constaté une journaliste de l’AFP.

La préfecture de police avait placé le concert sous haute surveillance, en interdisant les multiples manifestations prévues par les opposants. Mais depuis plusieurs jours, la bataille d’opinions faisait rage sur Twitter autour de la venue du chanteur.

Les premières interpellations de manifestants bravant l’interdiction ont débuté dès la mi-journée. A 23H00, 71 personnes avaient été interpellées, selon la préfecture, qui a dénoncé le « comportement scandaleux » de certains manifestants qui ont entravé l’action des pompiers.

Le « meneur des incendiaires » fait partie des personnes interpellées, avait précisé une source policière.

A Dakar, des citoyens nettoient une plage envahie de déchets médicaux dangereux

Des enfants avaient transformé en terrain de football une plage de Dakar jonchée de compresses, flacons de sang et aiguilles souillées, abandonnés sur le sable par des hôpitaux voisins. Samedi, des citoyens ont nettoyé le bord de mer de ces déchets dangereux.

Bordée d’eaux turquoises et de chantiers de construction, la plage du Cap-Manuel, jouxtant le centre-ville de Dakar, est remplie de monde. Quelque 200 bénévoles de tous âges et de plusieurs nationalités bravent le chaud soleil pour enlever les déchets médicaux de cette plage, habituellement très fréquentée par les Dakarois.

Une vidéo diffusée fin janvier par un lanceur d’alerte écologiste, Riad Kawar, avait suscité un émoi dans le pays. Elle montrait des dizaines de seringues, cathéters, tubes médicaux usagés abandonnés sur la plage.

« Quand ma vidéo a été diffusée, des médecins m’ont dit que les seringues visibles sur la plage sortaient de blocs de maladies infectieuses, et qu’elles auraient dû être incinérées », explique M. Kawar.

« On est arrivé à un stade de saturation écologique. Il fallait faire quelque chose », martèle t-il, en embrassant du regard la file de bénévoles se dirigeant vers la plage.

El Hadj Abdoulaye Seck, un Franco-sénégalais d’une quarantaine d’années en vacances à Dakar, est parmi eux. « Ce projet est d’une importance capitale. C’est un devoir pour tout citoyen sénégalais de participer au développement de notre pays », dit-il, souriant, avant de se munir d’une fourche et d’un seau.

Près de lui, un groupe de jeunes filles ratisse le sable à la recherche de tubes abandonnés. « Cette plage est la nôtre. Nous devons la garder propre pour les générations futures », explique Nogaye Diop, 25 ans, étudiante en management.

Ces déchets sont jetés depuis la falaise qui surplombe la plage par les hôpitaux attenants dont certains ne disposent pas d’incinérateur. A demi-mots, Dibocor Sène, chef de service de la division hygiène hospitalière de l’hôpital Le Dantec, qui jouxte la plage, explique que l’incinérateur censé brûler les déchets connaît des défaillances mécaniques.

« En cas de panne, nous avons un local de stockage des déchets. Mais de temps en temps, ça peut déborder. Quand il est rempli, les sacs sont empilés devant l’incinérateur (puis jetés sur la plage). C’est sans doute ce qui a causé ce tollé », explique M. Sène.

Municipalité, société de collecte des ordures, ministère de la Santé: les autorités contactées par l’AFP se sont renvoyées la responsabilité de l’abandon de ces déchets dans l’espace public. Une enquête a été ouverte par les autorités pour déterminer l’origine des déchets médicaux sur la plage.

« Est-on en Grèce? »: les migrants à l’assaut de la frontière terrestre gréco-turque

Certains jettent des morceaux de bois en feu, d’autres tentent de découper les barbelés: des milliers de migrants s’étaient massés samedi au poste-frontière de Kastanies, où quelque 500 soldats et policiers grecs tiraient sporadiquement des gaz lacrymogènes pour les empêcher d’entrer de Turquie dans l’UE.

A des kilomètres de là, des centaines de réfugiés ont réussi à pénétrer par groupes dans le nord de la Grèce en traversant à l’aube le fleuve Evros, qui longe la frontière sur 200 kilomètres, ont constaté des journalistes de l’AFP.

« Est-on en Grèce? », demande un jeune homme, qui a franchi la frontière dans la boue avec un groupe de 20 personnes. « Où peut-on trouver un taxi ou un train pour aller à Athènes », ajoute le réfugié afghan, rencontré sur une route locale près de la ville d’Orestiada.

La Turquie a annoncé vendredi qu’elle laisserait ouvertes aux migrants ses frontières avec l’Union européenne (UE). Depuis, militaires et policiers grecs ont renforcé leurs patrouilles le long du fleuve Evros, avertissant par haut-parleur de l’interdiction d’entrer en Grèce.

Mais la zone est vaste et ardue à surveiller. Les autorités grecques utilisent des drones pour tenter de localiser les groupes de migrants marchant près de la ligne invisible et surveiller leur avancée.

« Le fleuve Evros est vraiment très long et il y a des passages faciles », a souligné Christos Metios, gouverneur de Macédoine de l’Est et de Thrace. « Les forces de l’ordre grecques multiplient les efforts mais certains migrants arrivent à passer », a-t-il dit sur Skai TV.

« Depuis tôt ce matin, nous procédons sans cesse à des arrestations. Ce qui me frappe c’est que la plupart sont des jeunes hommes en provenance d’Afghanistan, sans bagage », rapporte un policier à l’AFP. Avec ses collègues, il vient d’interpeller dix migrants et les conduit à bord de deux vans blancs au poste de police le plus proche.

Au poste-frontière de Kastanies (Pazarkule côté turc), quelque 4.000 migrants et réfugiés se sont massés derrière les grillages, selon une source policière grecque, contre 1.200 la veille.

Certains ont grimpé aux arbres, d’autres ont cassé du béton qu’ils jettent du côté grec, d’autres encore lancent des grenades lacrymogènes par-dessus les fils barbelés.

Sur place, Panagiotis Harelas, président des garde-frontières grecs, montre aux médias certaines de ces grenades de fabrication turque: « Nous faisons face à la propagande turque et à des grenades lacrymogènes turques », fustige-t-il.

– Trempés et épuisés –

Sur les routes secondaires proches de la frontière, des groupes de réfugiés marchent sans relâche, certains ont perdu leurs chaussures dans le fleuve, ils sont trempés et couverts de boue, épuisés par des heures de marche dans le froid et sous la pluie.

Ils cherchent un moyen de rejoindre Thessalonique, la deuxième ville du pays, à 3 heures de route de là, ou Athènes, espérant contacter des représentants des Nations unies.

« Nous marchons depuis quatre jours. Nous avons traversé le fleuve car il n’y avait pas beaucoup d’eau », raconte à l’AFP un Iranien de 36 ans.

« Je veux atteindre l’Albanie et de là gagner l’Europe », confie ce réfugié rencontré près du village de Neo Cheimonio. Il a passé la frontière avec un groupe d’Afghans et d’Africains, sans bagages, dont les vêtements sont détrempés par les pluies de la nuit.

Dans le village de Marassia, à deux pas du fleuve, Popi Katrivezi, la propriétaire du café, a « l’habitude » de voir passer des réfugiés « depuis des années. « Mais ce qui se passe depuis vendredi est du jamais vu. Il semble qu’ils arrivent par milliers depuis la Turquie », dit-elle à l’AFP.

A quelques mètres de là, des familles afghanes ont trouvé refuge depuis une dizaine d’heures dans une chapelle. Il y a cinq enfants, ils ont faim et leurs vêtements sont mouillés. « Aidez-nous », implorent-ils, en demandant de l’eau et de la nourriture.

En Israël, derniers meetings de Netanyahu et Gantz avant les élections

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, inculpé pour corruption, et son rival Benny Gantz bouclent samedi soir leur troisième campagne électorale en moins d’un an dont l’issue dépend désormais de la volonté des électeurs à se rendre aux urnes.

Après deux élections n’ayant pas réussi à faire de vainqueur, en avril et septembre, les derniers sondages placent les deux rivaux au coude-à-coude pour cette dernière épreuve d’un long triathlon politique en Israël.

Selon ces projections, le Likoud (droite) de Benjamin Netanyahu et la formation centriste Kahol Lavan (Bleu blanc, couleur du drapeau israélien) obtiendraient 33 sièges chacun sur les 120 de la Knesset, le Parlement, un score quasi identique aux derniers scrutins.

Et en comptant leurs alliés respectifs – la droite et les partis religieux pour M. Netanyahu, le centre-gauche pour M. Gantz – aucun des deux grands blocs n’obtiendrait suffisamment d’appuis pour former un gouvernement selon ces sondages.

Samedi, jour de repos en Israël, les deux leaders se préparaient en journée à leurs derniers rassemblements de campagne prévus en soirée, après le shabbat, à Tel-Aviv pour M. Gantz et dans ses environs pour M. Netanyahu. Et leur message devrait être clair: galvaniser les électeurs.

Pour une troisième élection en moins d’un, la grande inconnue demeure le taux de participation. D’avril à septembre, la participation avait légèrement progressé (+1,5 point), en raison notamment du vote plus important que prévu des électeurs arabes, pour s’établir à près de 70%.

Les partis arabes israéliens, réunis sous la bannière de la « Liste unie », avaient gravi la troisième marche du podium et espère cette fois encore augmenter leur nombre de sièges en misant sur l’opposition au « plan Trump » pour le Moyen-Orient défendu par MM. Netanyahu et Gantz.

« Nous voulons la chute de Netanyahu car c’est le plus grand provocateur des citoyens arabes et c’est le parrain de ‘l’accord du siècle' », surnom du projet américain qui prévoit notamment de faire de Jérusalem la capitale « indivisible » d’Israël, a déclaré à l’AFP Ayman Odeh, le chef de la liste des partis arabes.

– Coronavirus –

Mais pour ce round 3, une inconnue s’invite dans l’arène : le coronavirus. Au cours des dix derniers jours, la campagne électorale a été en partie éclipsée dans les médias par l’épidémie mondiale de coronavirus touchant aussi Israël qui recense au moins six cas.

Les autorités ont pris une série de mesure d’urgence comme mettre sur pied un centre d’appel pour filtrer les cas potentiels et rassurer la population et bloquer l’accès au pays à des voyageurs provenant de différents pays dont l’Italie.

Pour les élections, le ministre de la Sécurité intérieure a d’ailleurs mis en garde contre la propagation de « fausses nouvelles » sur le coronavirus qui pourrait amputer, selon lui, la participation populaire aux élections de lundi, si des électeurs boudent les bureaux de vote par crainte de contamination.

– Procès Netanyahu –

Sur les boulevards de Jérusalem et Tel-Aviv, des publicités du camp Netanyahu exhortent directement les « Likoudniks » – terme désignant les sympathisants du parti Likoud – à soutenir leur chef qui est dans le viseur de la justice.

Benjamin Netanyahu, 70 ans, dont 14 au pouvoir, est devenu en novembre le seul chef de gouvernement de l’histoire d’Israël a être inculpé pendant son mandat, et de surcroît pour corruption, malversation et abus de confiance dans différents affaires.

Son procès doit s’ouvrir le 17 mars à Jérusalem, d’où l’importance cruciale de ce scrutin. S’il parvient, avec ses alliés, à obtenir une majorité de sièges au Parlement il pourra se présenter devant la justice en position de force et garder son job de Premier ministre.

Mais s’il n’arrive pas à obtenir de majorité avec ses alliés, il devra alors ferrailler pour s’imposer à la tête d’une coalition au moment même où s’ouvrira son procès pour corruption.

La Guinée-Bissau, abonnée aux coups de force politiques, a deux présidents

La Guinée-Bissau, petit pauvre pays d’Afrique de l’Ouest, s’est réveillée samedi avec deux présidents rivaux, fidèle en cela à son histoire d’instabilité chronique.

En l’espace de deux jours, Bissau a connu une succession de faits accomplis dont rien, a priori, ne permet de discerner le dénouement mais dans lesquels l’armée, actrice de premier plan des crises bissau-guinéennes, s’est engagée vendredi sans qu’apparaissent les limites de son implication future.

Jeudi, deux mois après le second tour d’une présidentielle toujours pas définitivement tranchée, celui qui a été déclaré vainqueur par la commission électorale nationale, Umaro Sissoco Embalo, a forcé le cours des évènements sans attendre que soit vidée la querelle post-électorale, et s’est fait investir président par son prédécesseur.

Depuis la présidentielle du 29 décembre, le pays est le théâtre d’un bras de fer entre M. Embalo, ancien général et ancien Premier ministre régulièrement coiffé d’un keffieh, et son adversaire Domingos Simoes Pereira, autre ancien Premier ministre.

C’est aussi une confrontation entre ceux qui ont rallié M. Embalo, issu de l’opposition, et le Parti africain pour l’indépendance de la Guinée et du Cap Vert (PAIGC), qui domine la vie politique de cette ancienne colonie portugaise depuis son indépendance en 1974.

M. Embalo a été donné vainqueur par la commission électorale avec 53,55%. M. Pereira, crédité de 46,45%, et le PAIGC dénoncent des fraudes et réclament qu’on recompte les votes.

– Intervention de l’armée –

M. Embalo est passé outre à une décision toujours attendue de la Cour suprême, saisie par le PAIGC: après avoir ceint l’écharpe de président jeudi, il s’est installé dans le palais présidentiel.

Vendredi, il a démis le Premier ministre (PAIGC) Aristides Gomes, reconnu par la communauté internationale, et a nommé à sa place un de ses partisans, Nuno Gomes Nabiam, candidat malheureux à la présidentielle qui a rejoint son camp entre les deux tours, avec d’autres résolus à battre le PAIGC.

L’investiture de M. Nabiam et la présentation de son gouvernement sont annoncées samedi.

La crise s’est emballée vendredi quand 52 députés du PAIGC et de formations sympathisantes ont convoqué une session spéciale. Ils y ont constaté « la vacance du pouvoir » et nommé président par intérim le président de l’Assemblée nationale, Cipriano Cassama, membre du PAIGC, celui-là même qui avait refusé cette semaine d’accorder sa caution à l’investiture de M. Embalo.

M. Cassama est censé s’adresser au pays samedi.

Dans la soirée de vendredi, des militaires se sont établis dans les institutions du pays et ont pris le contrôle de la radio et de la télévision, sans qu’on sache si l’armée a choisi un camp et lequel.

Elle agit pour « garantir la stabilité et la paix, contrôler les institutions de manière à éviter d’éventuels troubles à l’ordre public », a dit à l’AFP un officier s’exprimant sous le couvert de l’anonymat.

– Absence du corps diplomatique –

C’est le dernier épisode en date d’une histoire contemporaine chaotique, jalonnée de coups d’Etats ou de tentatives, le dernier putsch remontant à 2012.

Depuis 2014, le pays s’est engagé vers un retour à l’ordre constitutionnel, ce qui ne l’a pas préservé de turbulences à répétition, mais sans violence, entre le camp du président sortant et le PAIGC.

Le pays d’1,8 million d’habitants, l’un des plus pauvres de la planète, a pourtant un besoin pressant de réformes qu’a entravées la paralysie des dernières années.

Les narcotrafiquants utilisent le territoire pour faire transiter la cocaïne d’Amérique latine vers l’Europe, avec la complicité suspectée de cadres de l’armée.

C’est, avec la stabilité, l’un des grands enjeux pour la communauté internationale qui observe la situation. Le corps diplomatique était notoirement absent jeudi de la cérémonie où M. Embalo s’est fait investir.

La situation « risque d’aggraver la crise que connaît de longue date la population », s’est inquiété la Commission européenne. L’investiture d’un président devrait intervenir « au terme des procédures légales », a dit un porte-parole dans une apparente référence à la décision en suspens de la Cour suprême.