La guerre d’une religion fait rage au Monténégro

Serti dans une falaise verticale au coeur du Monténégro, le monastère d’Ostrog, réputé pour ses pouvoirs miraculeux, est un aimant pour les pèlerins orthodoxes. Mais guérisons et exorcismes suffiront-ils à apaiser les querelles religieuses qui secouent le petit pays des Balkans?

Car une bataille rangée fait rage. D’un côté, des prêtres qui accusent le gouvernement « néo-communiste » de vouloir faire main basse sur leurs monastères et leurs « saintes reliques », les fidèles protestant par dizaines de milliers dans la rue.

De l’autre, des autorités qui soupçonnent la principale Eglise du pays de servir des intérêts venus de la Serbie voisine, et réclament pour le Monténégro une Eglise « autonome ».

L’Eglise orthodoxe serbe (SPC), dont le siège est à Belgrade, représente la grande majorité des orthodoxes du Monténégro, malgré son divorce d’avec la Serbie en 2006 après quasi 90 ans de vie commune.

Parallèlement, une petite Eglise du Monténégro, très minoritaire, non reconnue par le monde orthodoxe, tente une « renaissance » depuis le début des années 1990.

Les deux institutions se renvoient à la figure des siècles d’histoire pour arguer être la seule authentique dans le petit pays de 620.000 habitants.

Le gouvernement du président Milo Djukanovic, aux commandes depuis trois décennies, a mis le feu aux poudres fin décembre avec une loi sur la liberté religieuse qui pourrait transférer à l’Etat la propriété d’une bonne partie des centaines de monastères aux mains de la SPC.

La SPC dénonce « l’héritage du fonctionnement communiste où les autorités veulent illégalement éliminer l’Eglise de la vie publique », selon les termes de Gojko Perovic, doyen du séminaire de Cetinje, l’ancienne capitale royale. « Elles veulent contrôler les activités de l’Eglise, ses propriétés et même son nom », dit-il.

– « Beaucoup d’argent » –

Parmi les biens susceptibles d’être concernés, le monastère d’Ostrog, édifice du XVIIe siècle fiché dans la montagne. Il abrite les reliques de Saint-Basile, réputées guérir les malades et exorciser les possédés.

« Le plus grand lieu saint des Balkans appartient à l’Eglise serbe, au peuple serbe et tous les peuples qui viennent ici avec la foi », tonne le prêtre Jovan Radovic, qui y officie de temps en temps.

La question a également des résonances financières du fait du grand nombre de touristes qui visitent les joyaux de la SPC disséminés à travers le pays.

Ostrog par exemple reçoit jusqu’à un million de visiteurs par an. Sans parler des « reliques » qui sont « inestimables », le « peuple laisse ici beaucoup d’argent », constate le père Radovic.

Le sujet déborde de la sphère religieuse et touche à la question de l’identité nationale dans un pays où un tiers des habitants s’identifient comme serbes.

Pour les autorités, le Monténégro a besoin de sa propre Eglise autonome, afin de consolider l’indépendance nationale, à l’instar de l’église ukrainienne séparée de l’église russe.

Les Serbes « n’ont aucun droit sur les églises qui nous appartiennent à nous Monténégrins, l’Eglise serbe est en Serbie et l’Eglise monténégrine est au Monténégro », martèle Ljubica Marinovic, une habitante de Cetinje.

C’est dans cette ville que se trouve le siège de la SPC mais aussi celui de l’Eglise du Monténégro. Le contraste entre les deux est saisissant.

– « Insatisfaction » –

La première est abritée dans un imposant monastère pluricentenaire quand le quartier général de la seconde est situé dans une simple maison.

La lumière peine à filtrer dans le minuscule bureau du patron de l’Eglise du Monténégro, l’évêque Mihajlo Dedeic, 82 ans. De son propre aveu, l’institution ne compte qu’une vingtaine de prêtres et une petite quarantaine de lieux saints.

Il espère que la situation va changer avec une loi décrite comme « positive ».

Le texte prévoit une cession à l’Etat des biens dont les Eglises ne peuvent prouver qu’ils leurs appartenaient avant 1918. Cette année-là, le Monténégro avait perdu son indépendance et été intégré au royaume des Serbes, Croates et Slovènes.

Une fois les églises dans le giron de l’Etat, le prêtre Mihajlo espère qu’il y aura moyen de « négocier » un « compromis » avec la SPC pour que les deux clergés puissent les utiliser.

En attendant, les orthodoxes de la SPC se désolent.

« Le premier problème avec la loi, c’est qu’un président d’un pays qui n’est pas baptisé va créer une nouvelle Eglise », soupire le père Radovic. « C’est incroyable », lâche-t-il.

A l’approche des législatives prévues à l’automne, les contempteurs du pouvoir l’accusent de vouloir se servir de la controverse pour détourner l’attention des gens de leurs problèmes.

Certains fidèles de la SPC sont dans la rue pour d’autres raisons que « l’injustice religieuse ». « Les gens sont ici à cause de l’insatisfaction massive face à l’économie et la démocratie », disait récemment Ljilkana Banjevic, manifestante de 62 ans.

En Israël, un centre d’appels pour rassurer la population sur le nouveau coronavirus

Plus de 15.000 appels la première journée. En Israël, les autorités ont mis en place un centre de crise doté d’une ligne d’urgence pour détecter les cas potentiels de nouveau coronavirus mais elles ont vite été débordées par les craintes d’une épidémie dans le pays.

Vendredi dernier, l’Etat hébreu confirmait son premier cas, sur deux, de nouveau coronavirus: une femme qui avait été placée en quarantaine sur le navire de croisière Diamond Princess. Elle venait d’être rapatriée à Tel-Aviv avec une dizaine d’autres anciens passagers du paquebot.

Quelques heures plus tard, samedi après le shabbat, les autorités ont annoncé l’ouverture d’un centre par la Magen David Adom (MDA), l’équivalent de la Croix-Rouge française, pour prévenir la propagation de ce virus.

Parti de Chine en décembre, l’épidémie a provoqué quelque 80.000 contaminations (dont près de 2.800 hors de Chine) et plus de 2.700 morts dans le monde, selon des chiffres communiqués mercredi par l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

À l’intérieur du centre d’appels installé à Kyriat Ono à l’est de Tel-Aviv, dans un édifice frappé d’une étoile de David rouge, parmi la horde de standardistes, une quinzaine de secouristes d’une unité spéciale, casque sur les oreilles, répondent aux citoyens inquiets.

« Quelqu’un a toussé dans l’autobus, est-ce que j’ai le coronavirus? »; « Mon ami revient d’Italie (très touchée par l’épidémie, NDLR), que dois-je faire? », « Je me sens enrhumé, dois-je être testé? », demandent des Israéliens.

Le premier soir, le centre a été assailli de 15.000 appels. Depuis, la moyenne a fléchi mais tourne autour de 6.500 par jour, indique la MDA.

« Si un patient appelle le 101 et qu’il a des symptômes similaires à ceux du coronavirus, il est directement transféré au centre d’appels spécialisé », explique à l’AFP Miriam Serkez, porte-parole d’une unité médicale.

« Les gens ont besoin d’informations. Quand on donne les bonnes réponses, cela calme la population », renchérit Ilan Klein, directeur adjoint du département international de la MDA.

– Tri et confinement –

Pour répondre à la crise, tout le personnel de la MDA a reçu une formation pour détecter les premiers symptômes du nouveau coronavirus. Une équipe de 145 secouristes a été mise sur pied pour prélever des échantillons sur des personnes potentiellement atteintes par le virus.

« Le ministère de la Santé nous a délégué la prévention et l’action », explique M. Klein à l’AFP.

Devant chaque secouriste, les informations défilent sur cinq écrans, avec notamment une carte d’Israël où apparaissent des petits drapeaux pour indiquer la localisation des appels. Le standardiste suit un protocole de questions bien défini lors de cette consultation téléphonique.

Si une personne doit être confinée, « une équipe, dotée d’une combinaison spéciale, est envoyée sur place pour effectuer des tests », indique Mme Serkez. « L’échantillon, complètement scellé, est par la suite envoyé au laboratoire, sans que le patient ait besoin de sortir de chez lui », ajoute-t-elle.

Si les symptômes sont plus sérieux, une équipe médicale la transportera à l’hôpital pour des soins, continue-t-elle.

Aux côtés d’une ambulance, à l’extérieur du centre, se trouve une civière surmontée d’un large couvercle de plastique. « Pour transporter les patients, il y a un lit isolé de toutes parts » avec « une machine spéciale qui aide à la circulation de l’air pour éviter toute propagation du virus », explique Mme Serkez.

Jusqu’à présent, 35 tests ont été réalisés et deux cas seulement ont été confirmés positives: deux passagers du Diamond Princess.

Mais la peur est bien réelle en Israël où, à quelques jours des élections législatives, le gouvernement a mis en garde contre la propagation de « fausses nouvelles » sur le nouveau coronavirus visant à « influencer la participation » de la population à ce scrutin crucial pour l’avenir politique du Premier ministre Benjamin Netanyahu.

D’autant que l’abstention demeure la grande inconnue de cette troisième élection en moins d’un an…

Grèce: violents incidents à Lesbos et Chios contre les nouveaux camps pour migrants

Des affrontements avec la police ont fait des dizaines de blessés mercredi sur les îles grecques de Lesbos et Chios, où les habitants protestaient pour le deuxième jour consécutif contre la construction de nouveaux camps pour les migrants.

A Lesbos, des centaines de personnes rassemblées à Mantamados, un village proche du site de construction d’un nouveau camp, ont jeté des pierres vers la police, qui a riposté avec du gaz lacrymogène, des grenades assourdissantes et des balles en plastique, selon un photographe de l’AFP.

« Nous sommes en temps de guerre. (La police) a les armes, nous avons nos coeurs et nos âmes », a déclaré un prêtre local, le père Stratis.

« Vous allez mourir ici », a crié un manifestant aux policiers tandis que d’autres insultaient les forces de l’ordre.

Lors des affrontements, qui ont duré toute la journée, dix manifestants et quarante policiers ont été blessés, selon une source policière.

Mercredi soir, environ 2.000 personnes se sont rassemblés devant une caserne où se trouvaient les policiers et ont tenté d’y pénétrer. La police anti-émeute a riposté avec du gaz lacrymogène.

A Chios, 2.000 personnes ont aussi manifesté contre le projet de construction d’un nouveau camp. Selon des médias locaux, un groupe de manifestants a fait irruption dans une chambre d’hôtel occupée par des policiers et les ont tabassés.

Huit policiers ont été blessés à Chios, a indiqué à l’AFP un porte-parole de la police du nord de la mer Egée.

Le Premier ministre Kyriakos Mitsotakis a appelé « au calme ».

« Les travaux de construction ont déjà commencé (…) les nouveaux camps sont situés très loin des régions urbaines », a-t-il affirmé.

Face à la colère des habitants contre les forces anti-émeutes, le porte-parole du gouvernement Stelios Petsas a annoncé mercredi soir qu' »une partie de policiers » arrivés sur les îles la veille de la Grèce continentale pour renforcer la sécurité « allait quitter les îles ».

– « Sommes-nous en guerre? » –

Mardi, des affrontements avaient déjà eu lieu à Lesbos et Chios avec les policiers protégeant les chantiers.

Plus de 38.000 demandeurs d’asile s’entassent dans des conditions sordides dans les camps actuels des îles de Lesbos, Samos, Chios, Leros et Kos, officiellement prévus pour 6.200 personnes.

Les habitants des îles, qui vivent depuis 2015, lors de la grande crise migratoire, avec les migrants réclament leur transfert en Grèce continentale et s’opposent aux projets de construction de nouveaux camps du gouvernement.

« Nous nous battons également pour ceux qui veulent partir pour un endroit meilleur. Nous voulons qu’ils partent », a déclaré le père Stratis. « Nous accepterons les réfugiés de guerre, mais les criminels devraient partir ».

Le gouvernement conservateur, arrivé au pouvoir en juillet, a annoncé que les camps de Lesbos, Samos et Chios seraient fermés cette année pour être remplacés par de nouvelles installations « fermées », plus petites, qui devraient être opérationnelles mi-2020.

Après des semaines de pourparlers infructueux avec les autorités locales, le gouvernement a envoyé lundi par bateau des engins de chantier et la police antiémeute, provoquant l’indignation.

Les partis d’opposition ont dénoncé une décision antidémocratique et les responsables locaux une tentative « barbare » de « transformer de force Lesbos et Chios en prisons ».

L’Etat avait déjà mis en colère les insulaires courant février en annonçant que des terres pourraient être réquisitionnées pour une période de trois ans pour construire les nouveaux camps.

« Il y a une limite à notre patience. Ils réquisitionnent des terres et amènent la police antiémeute, utilisent les lacrymogènes contre les gens. Sommes-nous en guerre ? », s’est indigné Stratos Paspalas, un boucher à la retraite à Lesbos.

Le gouvernement avait tenté à plusieurs reprises, en vain, de convaincre les autorités locales de la nécessité de ces nouveaux camps.

Mardi, le gouvernement avait mis en avant l’apparition de cas de coronavirus en Europe pour justifier la construction de ces camps. Ces cas « peuvent être gérés rapidement et efficacement dans une structure fermée, non dans une structure ouverte qui constitue une bombe sanitaire », avait dit le porte-parole du gouvernement.

Joe Biden à l’heure du quitte ou double pour la Maison Blanche

Crédité d’une meilleure performance au dernier débat démocrate, Joe Biden conservait mercredi ses chances de remporter l’élection primaire en Caroline du Sud, un défi qu’il s’est lui-même fixé après un début de campagne décevant.

Il joue quasiment son va-tout samedi dans cet Etat du Sud qui a fait partie des 13 colonies fondatrices du pays à la fin du XVIIIe siècle.

« Je vais remporter la Caroline du Sud », a martelé mardi soir l’ancien vice-président de Barack Obama, lors d’un débat particulièrement âpre opposant dans la ville historique de Charleston les sept principaux . « Je vais gagner le vote afro-américain », a-t-il insisté.

Gageant sur sa popularité au sein de l’électorat noir, Joe Biden était jusqu’à récemment le favori incontesté de ce scrutin. Les Afro-Américains représentent en Caroline du Sud les deux tiers des votants démocrates.

Mais c’était avant l’essor de Bernie Sanders qui, au plan national, a pris la tête de la compétition pour décrocher l’investiture du parti démocrate, grâce à ses bon résultats dans les premiers Etats ayant voté aux primaires: l’Iowa, le New Hampshire et surtout le Nevada où le sénateur socialiste a nettement distancé ses rivaux.

– Bon débat mais bourdes –

MM. Biden et Sanders, respectivement âgés de 77 et 78 ans, sont désormais au coude-à-coude en Caroline du Sud. Mais ce prochain terrain d’affrontement sera bien différent du New Hampshire, Etat jouxtant le Vermont dont est issu « Bernie », ou du Nevada où le sénateur promoteur d’une assurance santé universelle révolutionnaire a réussi une percée chez les Hispaniques.

Joe Biden pourra compter sur l’aide de l’influent élu noir Jim Clyburn, qui mercredi matin lui a déclaré publiquement son soutien.

Le septuagénaire aux rares cheveux blancs plaqués sur le crâne est apparu combatif lors de ce dixième débat démocrate, marquant notamment des points par ses vibrants appels visant l’électorat noir et l’évocation de sa lutte pour financer le port de Charleston.

Mais il peine à dissiper les doutes sur sa forme mentale, brouillant son message avec un léger bégaiement et en accumulant les bourdes.

Sur le plateau télévisé de la joute oratoire organisée par CBS, il a ainsi affirmé que les armes à feu avaient fait « 150 millions » de morts depuis 2007 aux Etats-Unis, soit la moitié de la population du pays. M. Biden a aussi parlé des « camps de reconstruction » (plutôt que rééducation) des Ouïghours du Xinjiang, avant de se reprendre et dire camps « de concentration ».

La veille, il avait commis d’autres impairs, confondant l’actuel président chinois Xi Jinping avec l’un de ses prédécesseurs décédé, Deng Xiaoping. Dans un autre discours, Joe Biden s’est présenté comme candidat « au Sénat américain ».

De son côté M. Sanders a été mis en difficulté à plusieurs reprises, notamment sur le financement de ses mesures de santé ou sur sa défense du programme d’alphabétisation castriste. Il est devenu la cible principale des attaques de ses concurrents.

Conscient que la Caroline du Sud est pour lui un rendez-vous à ne pas rater s’il veut conserver sa dynamique actuelle, le sénateur du Vermont a rejoint mercredi M. Biden à un petit déjeuner organisé sous l’égide du révérend Al Sharpton, une personnalité respectée du mouvement de défense des droits des Noirs.

– Sept Blancs parlent des Noirs –

En embuscade derrière le tandem Biden-Sanders, les autres principaux candidats démocrates étaient également présents: le trentenaire Pete Buttigieg, les sénatrices Amy Klobuchar et Elizabeth Warren, l’homme d’affaires Tom Steyer. Tous blancs, ils ont chacun vanté leur politique en faveur des minorités.

Manquait le milliardaire Michael Bloomberg, 78 ans, dont les centaines de millions de dollars déversés dans sa campagne compensent plus ou moins ses mauvaises prestations lors des deux seuls débats auxquels il a pris part.

L’ex-maire de New York a choisi de faire l’impasse sur les quatre premiers Etats des primaires pour se concentrer sur les millions d’électeurs du « Super Tuesday », le 3 mars, quand 14 Etats se prononceront pour choisir le champion démocrate qui affrontera Donald Trump en novembre.

Ce dernier a dénigré mercredi dans des tweets moqueurs les participants au débat. « Donnez-moi juste un adversaire », a-t-il écrit, sous-entendant que personne n’était de taille à rivaliser avec lui.

Avec la chute de Kafranbel, la « révolution » syrienne orpheline d’un symbole

En ralliant l’opposition syrienne en 2011, la ville de Kafranbel se démarquait par l’ironie mordante des slogans et des pancartes brandies contre le pouvoir de Bachar al-Assad. Avec sa reconquête par le régime, la « révolution » est orpheline d’un de ses ultimes symboles.

Les forces du régime ont repris mardi Kafranbel, progressant dans le sud de la province d’Idleb à la faveur d’une offensive meurtrière menée contre les jihadistes et les rebelles du nord-ouest syrien, avec le soutien de l’allié russe.

Kafranbel était « l’icône de la révolution, son étincelle et son luth résonnant », lâche dans un lyrisme amer Ibrahim Soueid, qui a fui la ville avec sa famille depuis dix mois à cause des violences.

Malgré son départ, le déplacé continuait de s’y rendre régulièrement. Mardi il était aux abords de la ville, jusqu’à une heure du matin, assistant impuissant à sa chute.

« Je suis parti quand j’ai été sûr qu’elle a été prise par l’ennemi », regrette l’homme de 31 ans.

« Ce fut une journée éprouvante. Après neuf ans de révolution, Kafranbel est désormais occupée », ajoute ce père de trois enfants, qui vit désormais dans le nord d’Idleb.

Il se souvient de sa première manifestation anti-pouvoir à Kafranbel, organisée en avril 2011, deux semaines après le début de la « révolution », partie du sud du pays.

A l’époque, il avait contribué à fonder un « bureau médiatique » à Kafranbel, avec un groupe de militants.

Parmi eux Raed Fares, connu pour ses pancartes et ses dessins réalisés avec humour, en anglais et en arabe, et très souvent brandis durant les manifestations. Très critique des jihadistes, le militant a été assassiné par balle en novembre 2018.

– Les débuts euphoriques –

Avec la répression dans le sang des manifestations anti-Assad par le régime, le soulèvement s’est transformé au fil des ans en conflit armé.

Kafranbel fut le théâtre d’affrontements entre l’armée et des déserteurs devenus des rebelles. La ville s’est affranchie en 2012 de l’emprise gouvernementale.

Ibrahim se souvient encore d’une vidéo qu’il avait tournée à l’époque, après la victoire des rebelles, montrant Raed Fares et d’autres militants laissant exploser leur joie.

Pendant des années, la ville s’était démarquée par la créativité et l’humour de ses habitants lors des rassemblements organisés chaque vendredi à travers le pays.

L’un des slogans les plus célèbres remonte au 14 octobre 2011, au moment où la confrontation armée prenait le pas sur la contestation pacifique.

« A bas le régime et l’opposition (…) A bas la nation arabe et musulmane, à bas le Conseil de sécurité (…) A bas le monde (…) A bas tout ».

Durant les années suivantes, ces slogans ont évolué au rythme des transformations du conflit et de ses acteurs: « Etat islamique en Irak et en Syrie: nous ne l’avons pas libérée (la Syrie, ndlr) pour que vous la gouverniez (…) Partez », en allusion à ce qui devait devenir le groupe Etat islamique.

Les slogans n’ont épargné aucune faction, y compris les jihadistes de Hayat Tahrir al-Cham (HTS, ex-branche syrienne d’Al-Qaïda) dont le pouvoir s’est renforcé à partir de 2017.

HTS avait alors interdit à Radio Fresh, créée par Raed Fares, de diffuser de la musique. Ce dernier avait choisi de diffuser à la place des sons d’animaux.

– « Tout ça a pris fin » –

Kafranbel a été totalement désertée par ses 20.000 habitants, selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH).

Damas, avec l’appui de l’aviation russe, a lancé en décembre une offensive d’envergure contre la province d’Idleb et ses environs.

Plus de 400 civils ont été tués, selon l’OSDH, et plus de 948.000 personnes ont été déplacées d’après l’ONU.

Affaibli au début du conflit, le régime a multiplié les victoires face aux jihadistes et aux rebelles ces dernières années, grâce au soutien de la Russie et de l’Iran.

Il contrôle désormais plus de 70% de la Syrie en guerre.

« Pas un seul pilier ne tient encore debout. Ma maison a sans doute été détruite », déplore le militant Bilal Bayouche, 27 ans, qui a trouvé refuge dans la ville d’Idleb après avoir fui Kafranbel.

Ce père de deux enfants se souvient qu’à chaque nouvel évènement en Syrie, « une caricature apparaissait sur les murs de Kafranbel ».

Aujourd’hui, il ne reste plus que des souvenirs.

« Nous chantions et riions pour la révolution (…) Tout ça a pris fin avec (la chute de) Kafranbel ».

Etats-Unis: où en sont les principaux candidats démocrates ?

Trois jours avant un scrutin crucial en Caroline du Sud qui déterminera la dynamique juste avant l’avalanche de votes du « Super Tuesday », où en sont les sept principaux candidats à l’investiture démocrate pour la Maison Blanche?

– Bernie Sanders –

Assailli par ses rivaux lors d’un débat démocrate mardi à Charleston, notamment sur ses anciens flirts avec des régimes communistes mais aussi le flou autour du financement de sa profonde réforme du système de santé, Bernie Sanders, 78 ans, est le grand favori de la course à l’investiture du parti.

Le sénateur indépendant du Vermont, qui est en tête des sondages nationaux avec 29% des intentions de vote, pourrait se permettre de perdre le vote des primaires en Caroline du Sud samedi et resterait très bien placé pour le scrutin décisif du « Super Tuesday » mardi, lorsque 14 Etats voteront.

– Joe Biden –

« Je vais gagner la Caroline du Sud », a martelé Joe Biden, 77 ans, lors du débat de mardi où il s’est montré plus combatif que lors des précédentes joutes télévisées.

L’ancien vice-président, qui mène dans les sondages en Caroline du Sud avec 30,3% des intentions de vote, mise gros sur ce scrutin au sein d’un Etat où les Noirs représentent plus de la moitié de l’électorat démocrate. Une victoire permettrait à M. Biden de se relever après ses résultats piteux dans l’Iowa et le New Hampshire et ainsi relancer la dynamique de sa campagne avant le « Super Tuesday ». Mais les doutes sur son âge, sa forme, après des gaffes remarquées, et sa capacité à être président ne sont pas prêts de disparaître.

– Michael Bloomberg –

Le milliardaire Michael Bloomberg, 78 ans, se positionne en troisième dans les sondages nationaux, après avoir inondé le pays de publicités, puisant plus de 500 millions de dollars dans sa fortune personnelle pour financer sa campagne. Mais l’image bien lisse projetée dans ses spots de campagne a été craquelée après ses prestations, d’abord désastreuse puis plus ferme sans pour autant faire d’étincelles, lors des deux débats auxquels il a pris part.

Si l’ancien maire de New-York ne participe pas au scrutin en Caroline du Sud, il demeure un concurrent solide pour le vote du « Super Tuesday ».

– Pete Buttigieg –

Quasi inconnu il y a un an, Pete Buttigieg, 38 ans, fait figure de révélation de la campagne des primaires démocrates avec des bons résultats inattendus aux scrutins de l’Iowa et du New Hampshire.

L’ancien maire de South Bend, ouvertement homosexuel, manque toutefois de soutien au sein des minorités du pays, qui lui reprochent son bilan en matière de discrimination raciale et, pour certains électeurs religieux, son orientation sexuelle. Or cet électoral est crucial pour qu’un démocrate décroche la Maison Blanche. Obtenir un bon score en Caroline du Sud sera un vrai défi pour le candidat modéré actuellement cinquième dans les sondages dans cet Etat.

– Elizabeth Warren –

Un temps favorite des primaires démocrates, Elizabeth Warren, 70 ans, dont le programme est très à gauche, voit son horizon obstrué par les bonnes performances de Bernie Sanders, « socialiste » autoproclamé.

Féroce dans les débats publics, la sénatrice progressiste est à la traîne dans les sondages et en situation très périlleuse après trois mauvais résultats aux primaires démocrates. Dégager un bon score en Caroline du Sud constituera pour elle un défi de taille.

– Amy Klobuchar –

Après une troisième place surprise dans le New Hampshire, la sénatrice Amy Klobuchar, 59 ans, est désormais à la peine dans les sondages. Les échéances décisives des primaires en Caroline du Sud et du « Super Tuesday » seront redoutables pour la candidate modérée du Midwest, qui pourrait bien devoir jeter l’éponge en mars, faute de financements suffisants et sous la pression de démocrates qui s’inquiètent de voir le vote modéré se diviser entre autant de candidats, face à un Bernie Sanders en plein élan.

– Tom Steyer –

Le milliardaire et philanthrope Tom Steyer, 62 ans, joue son va-tout en Caroline du Sud où il s’est concentré sur la communauté noire de l’Etat à coups de publicités et de réunions publiques, dépensant plus de 20 millions de dollars selon CNN.

Une stratégie qui lui permet de pointer en troisième position des intentions de vote dans cet Etat. S’il ne réussit pas son pari, la course pourrait cependant se terminer rapidement pour M. Steyer, lui aussi sous pression pour dégager la voie à un vote plus modéré.

Togo: l’opposant Kodjo dépose un recours pour contester les résultats de la présidentielle

L’opposant Agbéyomé Kodjo, arrivé à la seconde place de l’élection présidentielle au Togo, derrière le président sortant Faure Gnassingbé, a annoncé mercredi à l’AFP avoir déposé un recours devant la Cour constitutionnelle, dénonçant de « faux résultats » et une « mascarade électorale ».

« J’ai déposé mardi soir un recours devant la Cour constitutionnelle. Nous attendons que la Cour récuse les faux résultats publiés par la Céni (Commission électorale nationale indépendante) », a expliqué l’opposant.

Cet ancien Premier ministre et outsider de l’opposition a obtenu 18,37% des voix, contre 72,36% pour le président sortant, selon les résultats préliminaires officiels.

Le candidat du Mouvement patriotique pour la démocratie et le développement (MPDD) s’est toutefois auto-déclaré « président de la République togolaise », quelques heures avant la proclamation des résultats de la Céni, dénonçant de graves « irrégularités ».

M. Kodjo a plusieurs fois appelé les Togolais à se « mobiliser pour manifester leur désapprobation face à cette mascarade électorale et à défendre leurs suffrages », mais son appel n’a pas eu d’écho.

Les observateurs de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) ont exhorté les candidats à « respecter les résultats issus des urnes et proclamés par les institutions » et à recourir, si besoin, « aux voies légales », dans une déclaration lue lundi lors d’une conférence de presse.

L’Union africaine (UA) a également appelé le peuple togolais à « continuer d’oeuvrer pour préserver la paix, la stabilité, afin de consolider la démocratie et l’Etat de droit ».

De son côté, Faure Gnassingbé, âgé de 53 ans, a fêté lundi sa victoire avec ses partisans, mais n’a pas fait de discours à la nation.

« Cette victoire est belle, elle est franche, parce qu’elle est le fruit de nos efforts collectifs (…). Cette victoire, personne ne peut la voler, elle nous appartient, avait-il lancé devant la foule.

M. Gnassingbé, arrivé au pouvoir en 2005 après le décès de son père, le général Gnassingbé Eyadéma, qui avait lui-même dirigé le Togo pendant 38 ans, a été réélu depuis lors de scrutins tous contestés par l’opposition.

Il garde d’importants alliés parmi ses pairs africains et avec la France, ex-puissance coloniale impliquée dans la lutte contre les mouvements jihadistes au Sahel voisin, qui restent particulièrement sensibles à la stabilité du Togo dans cette région volatile.

Cameroun: la communauté internationale « bienvenue » pour régler la crise, affirme un opposant

La communauté internationale est la bienvenue au Cameroun pour aider à régler la crise meurtrière qui secoue les régions anglophones du pays, a affirmé l’opposant Maurice Kamto mardi devant une foule de plusieurs centaines de personnes à Douala.

« Si les partenaires du Cameroun sont prêts à venir nous aider à régler la crise, alors je leur dis bienvenue », a-t-il lancé lors de sa première intervention en public depuis les législatives de début février.

Après le meurtre de 23 personnes mi-février dans les régions anglophones du Cameroun, attribué notamment à des militaires par plusieurs ONG, plusieurs partenaires du pays, dont la France, avaient demandé à Yaoundé de changer de ligne. La présidence de Paul Biya avait alors rétorqué que « le président est comptable de son action devant le seul peuple camerounais souverain, et non devant un dirigeant étranger ».

« Si les autres s’intéressent à ça, c’est parce que nous n’avons pas été en mesure de régler ça entre nous », a lancé M. Kamto.

Son parti, le Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC) avait appelé à boycotter les législatives en raison du conflit entre indépendantistes et l’armée, qui a fait plus de 3.000 morts et poussé plus de 700.000 personnes à quitter leurs domiciles dans les régions anglophones du Sud-Ouest et du Nord-Ouest.

M. Kamto s’est félicité du taux de participation très bas, estimant que le « mot d’ordre de boycott » avait été suivi à 77% ». Le taux des participation et l’ensemble des résultats n’ont pas encore été publiés.

Le candidat malheureux à la présidentielle de 2018 face au président Paul Biya, qui avait passé près de 9 mois en prison en 2019, n’a en revanche pas directement réagi aux propos d’Emmanuel Macron.

Le président français avait affirmé samedi qu’il allait mettre « la pression » sur son homologue camerounais pour mettre un terme aux violences, et a à cette occasion assuré que M. Kamto avait été libéré après son intervention.

Alors que les autres partis faisaient campagne début février, M. Kamto avait visité plusieurs pays, dont la France, le Canada et les Etats-Unis, où il affirme avoir plaidé pour un règlement pacifique du conflit qui oppose les indépendantistes anglophones et l’armée.

« Il faut retirer l’armée » des régions anglophones, a-t-il demandé mercredi, exigeant également l’organisation d’un dialogue avec des dirigeants indépendantistes, dont Julius Ayuk Tabe, qui a été condamné à la prison à vie en août.

Présidentielle contestée à Bissau: un des candidats invite à son investiture

L’un des deux candidats au second tour de la présidentielle en Guinée-Bissau a déclaré mercredi son intention de se faire investir jeudi au poste de chef de l’Etat, malgré l’imbroglio persistant sur l’issue du scrutin.

La contestation menée par son adversaire et la confusion qui continue à régner deux mois après ce second tour rendent tout sauf certain qu’Umaro Sissoco Embalo sera bel et bien investi jeudi.

Cependant M. Embalo s’est appuyé sur une décision prise mardi en sa faveur par la commission électorale pour exprimer sa détermination à prendre la charge de président.

« Dans un esprit d’unité et de concorde nationale, j’invite tous mes compatriotes à la cérémonie de mon investiture qui aura lieu demain » jeudi, a-t-il annoncé sur les réseaux sociaux.

Deux mois après le second tour du 29 décembre, la Guinée-Bissau est dans une profonde impasse politique.

Umaro Sissoco Embalo, issu de l’opposition, a été donné vainqueur par la commission électorale avec 53,55% des voix.

Une victoire que conteste son rival Domingos Simoes Pereira (crédité de 46,45%), du Parti africain pour l’indépendance de la Guinée et du Cap-Vert (PAIGC), la formation qui domine la vie politique de cette ancienne colonie portugaise depuis son indépendance en 1974.

M. Pereira et le PAIGC dénoncent des fraudes et réclament qu’on recompte tous les votes.

La Cour suprême, saisie par le PAIGC, a rendu des arrêts qui réclament la vérification des procès-verbaux mais qui n’ont pas permis de trancher le contentieux. La querelle oppose aussi la Cour suprême et la commission électorale.

Celle-ci, à nouveau réunie mardi, a confirmé les résultats qu’elle avait annoncés.

Selon Armando Tchoba Dos Santos, un juriste interrogé par un correspondant de l’AFP, la Cour suprême est à nouveau appelée à se prononcer sous 48 heures. Par ailleurs, les conditions d’une éventuelle investiture n’étaient pas réunies mercredi matin au parlement.

En Guinée-Bissau, une mystérieuse hécatombe de vautours

Des centaines de vautours sont morts pour une raison mystérieuse ces derniers jours en Guinée-Bissau, ont indiqué mardi les autorités, qui ont recommandé aux populations d’éviter les contacts avec les cadavres des rapaces pour écarter les risques de contamination dans l’attente des résultats d’analyses vétérinaires.

Des dizaines de vautours morts ont notamment été retrouvés aux abords de l’abattoir principal de Bissau, où ils rôdent habituellement en grand nombre pour se nourrir de déchets de viande, ont indiqué des ouvriers de l’établissement.

Le phénomène a touché depuis environ une semaine plusieurs régions de cette ancienne colonie portugaise d’Afrique de l’Ouest au climat tropical, notamment Bafata (est), Quebo (sud) et l’archipel des Bijagos (ouest), avant d’atteindre la capitale.

« J’ai été avisé par des bouchers et la population de la découverte des carcasses de vautours. Au total, on en a dénombré une centaine, mais nous n’avons pas encore une source médicale ou vétérinaire pour nous donner les raisons (expliquant) autant de morts de vautours », a déclaré à la presse le gouverneur de la région de Bafata, Dundu Sambù.

Quelque 135 rapaces ont été incinérés lundi dans cette région, à l’écart des zones habitées et sous la surveillance des autorités sanitaires et de représentants de l’Etat, selon le journal bissau-guinéen O Democrata, qui estime à plus de 240 le nombres de rapaces morts ces derniers jours dans le pays.

Des prélèvements ont été effectués et seront analysés dans un laboratoire de Dakar, au Sénégal voisin, afin de déterminer s’il s’agit d' »une grippe aviaire ou non », a déclaré à l’AFP un responsable national des services vétérinaires, Mboma Baldé.

Les populations ont été invitées à éviter tout contact avec les oiseau morts et à empêcher les animaux domestiques de s’en approcher ou de s’en nourrir, a indiqué le gouverneur de Bafata, cité par O Democrata.

Dans les îles des Bijagos, au large de Bissau, où le vautour est un animal totem, des habitants ont sacrifié des poulets et répandu de l’huile de palme sur l’autel lors de cérémonies traditionnelles pour conjurer ce qu’ils estiment être une malédiction, a expliqué à l’AFP le fils d’un féticheur local.