Les 27 en ordre de bataille pour un sommet tendu sur le budget

Les chefs d’Etat et de gouvernement européens se retrouvent jeudi à Bruxelles pour un sommet sur le budget à long terme de l’Union, une réunion qui s’annonce agitée en raison des divergences profondes entre Etats membres.

Sauf surprise, ce premier tour de piste ne devrait pas déboucher sur un accord, rendu d’autant plus difficile par le Brexit, puisque ce budget 2021-2027 devra se passer de la contribution du Royaume-Uni (entre 60 et 75 milliards d’euros sur 7 ans), qui en était le deuxième contributeur après l’Allemagne.

La chancelière allemande Angela Merkel, dont le pays est celui qui va combler la plus grosse part du trou du Brexit, a prédit des « négociations très dures et compliquées ».

« Lors d’une première réunion, il est normal que les Etats membres affichent des positions dures vis-à-vis de leurs opinions publiques. Trouver un compromis sera encore plus compliqué que d’habitude en raison d’une rigidité accrue des positions et du trou du Brexit », prévoit Marta Pilati du European policy centre (EPC).

Les 27 vont devoir s’entendre sur le niveau du budget, de l’ordre de 1.000 milliards d’euros, qui sera de toute façon inférieure au précédent CFP (cadre financier pluriannuel de 2014-2020) et sur sa ventilation (agriculture, aides aux régions les plus défavorisées, lutte contre le changement climatique, numérique…).

Sans oublier les rabais, une pratique qui bénéficie aujourd’hui à 5 pays – Allemagne, Danemark, Pays-Bas, Autriche et Suède -. Les autres, France en tête, voudraient y mettre fin à la faveur du départ du Royaume-Uni puisque c’est ce pays qui l’a inauguré en 1984, après le tonitruant « I want my money back » (rendez-moi mon argent) de Margaret Thatcher.

Sur le premier front, le groupe des « frugaux » (Autriche, Pays-Bas, Danemark, Suède) ne veut pas que le niveau total du budget dépasse 1% du revenu national brut (RNB) de l’UE. Certains y associent l’Allemagne dont la position est un peu moins dure.

La Commission, qui a notamment pour priorités la lutte contre le changement climatique et le numérique, voudrait 1,114%.

Quant au président du Conseil, Charles Michel, qui a multiplié les rencontres bilatérales, sa proposition de compromis de 1,074% sera au coeur du sommet extraordinaire.

« Tout est sur la table. Faire durer ne rendra pas les choses plus faciles. Il est temps de décider », a-t-il averti à la veille du sommet alors qu’est évoquée une possible prolongation de la réunion jusqu’au week-end.

Cette bataille de pourcentages a son importance car 0,01 point représente plus de 10 milliards d’euros.

– « Défaillance de l’ambition » –

Le deuxième front est celui de la répartition, sachant que 60% environ du budget est consacré à l’agriculture et à la politique de cohésion (l’aide aux régions les moins développés).

Ces deux enveloppes accusent une baisse globale de près de 100 milliards d’euros par rapport au dernier budget.

La France est en première ligne sur la Politique agricole commune (PAC), suivie notamment par l’Espagne, actuellement sous la pression de manifestations d’agriculteurs.

Paris exige sa « revalorisation », une « priorité absolue ». Quant aux pays de l’est et du sud réunis au sein des « amis de la cohésion », ils veulent que cette politique soit maintenue au même niveau.

« Après le Brexit, nous avons décidé une relance de notre projet commun. Et à la première occasion de concrétiser, on a des moyens financiers au rabais. Nous sommes devant une défaillance de l’ambition collective », regrette un diplomate européen.

« Le plan A, c’est un budget à 1% et le rabais, le plan B idem », a déclaré de son côté un autre diplomate du camp opposé, celui des « frugaux ».

Dans ce concert de critiques, le projet de Charles Michel apporte deux nouveautés. Pour la première fois, un lien a été établi entre le versement de fonds européens et le respect de l’Etat de droit, que la Pologne et la Hongrie sont accusées de violer.

En plus des contributions, la proposition renforce aussi les ressources propres de l’Union avec une « taxe » sur les plastiques non-recyclés et des revenus issus du marché du carbone.

Le Parlement irlandais se réunit, la formation du gouvernement dans l’impasse

Les députés irlandais se réunissent jeudi pour la première fois depuis les législatives marquées par une percée historique des républicains du Sinn Fein, sans nouveau gouvernement car les discussions entre les trois principaux partis politiques du pays sont dans l’impasse.

La forte progression du Sinn Fein à l’issue du scrutin du 8 février a chamboulé le paysage politique irlandais, dominé depuis un siècle par les deux grands partis de centre-droit, le Fianna Fail et le Fine Gael du Premier ministre sortant Leo Varadkar.

Les 160 députés du Dail, la chambre basse du Parlement irlandais, doivent se réunir à partir de 12H00 GMT. Après l’élection du président de la chambre, le « speaker », les différentes formations politiques présenteront leurs candidats au poste de Premier ministre (Taoiseach), occupé par M. Varadkar depuis juin 2017.

Mais faute de majorité et d’accord entre les partis, la séance risque fort de tourner court.

La répartition des sièges est particulièrement éclatée: le Fianna Fail compte 38 députés, le Sinn Fein 37, le Fine Gael 35.

Autrefois considéré comme la vitrine politique de l’IRA, l’Armée républicaine irlandaise, organisation paramilitaire opposée à la présence britannique en Irlande du Nord, le Sinn Fein se trouve aux portes du gouvernement.

Lors du scrutin, où les électeurs composent eux-même leur liste en classant les candidats par ordre de préférence, le Sinn Fein a été placé en tête par 24,5% des électeurs, devant les deux grands partis centristes. Mais le parti républicain dirigé par Mary Lou McDonald n’avait présenté que 42 candidats, soit environ moitié moins que le Fianna Fail et le Fine Gael.

Les propositions de ce parti de gauche en matière de logement, de santé, problématiques au coeur des préoccupations des Irlandais, ont rencontré un franc succès, mais une autre question surgirait au coeur du débat s’il accédait aux responsabilités: celle de l’unification de l’Irlande.

Le Sinn Fein est la deuxième force politique sur l’île, que ce soit dans la province britannique d’Irlande du Nord ou dans la République au sud. Il veut un référendum dans les cinq ans, voire trois ans, qui viennent.

L’accord du Vendredi Saint, qui a mis fin en 1998 à trois décennies de violences qui ont fait 3.500 morts, prévoit qu’un référendum soit organisé s’il apparaît qu’une majorité de la population est favorable à l’unification.

– De nouvelles élections ? –

Le rapport de forces au Parlement est tel qu’il faudra qu’au moins trois partis s’entendent pour former un gouvernement de coalition.

Fianna Fail et Fine Gael ont tous deux exclu de travailler avec le Sinn Fein, qui de son côté a pris des contacts avec de plus petits partis à gauche dans l’espoir de former une large alliance. Mais les chances de succès semblent minces.

Le chef du gouvernement sortant Leo Varadkar, qui a fait campagne sur son succès dans les négociations sur le Brexit pour trouver une solution évitant le retour d’une frontière physique entre les deux Irlande, a déclaré qu’il se préparait à entrer dans l’opposition.

Selon le journaliste politique de la radio-télévision publique RTE Micheal Lehane, le Premier ministre semble envisager une alliance avec le Fianna Fail en « dernier recours ».

Et si les trois principaux partis ne travaillent pas ensemble, les Verts, quatrième force politique avec 12 sièges, pourrait avoir un rôle décisif.

Ils ont proposé au Sinn Fein, au Fianna Fail et au Fine Gael de les rencontrer à partir de vendredi. « Nous proposons ces rencontres bilatérales pour clarifier points d’accords et différences avec chacun des partis », a déclaré dimanche le leader du parti, Eamon Ryan.

« Nous espérons que cela nous permettra de nous assurer que des négociations sur la formation d’un gouvernement soit basée sur une réelle analyse politique », a-t-il ajouté.

Les discussions pourraient être longues et en cas d’échec, conduire à de nouvelles élections.

Après les dernières législatives de 2016, il avait fallu 70 jours pour former un gouvernement de coalition entre Fine Gael et Fianna Fail.

Allemagne: huit morts dans deux fusillades près de Francfort

Au moins huit personnes ont été tuées mercredi soir à Hanau, près de Francfort (centre de l’Allemagne), dans deux fusillades et la police a « lancé une chasse à l’homme à grande échelle » pour retrouver le ou les auteurs.

Ces fusillades auraient visé des bars à chicha et aurait fait au moins cinq blessés graves, selon des médias locaux.

« A ce stade, la police peut seulement confirmer que huit personnes ont été mortellement blessées », ont indiqué les autorités dans un communiqué.

Un important dispositif policier a été déployé dans cette ville, située à une vingtaine de kilomètres de Francfort (Hesse), selon la même source. Un journaliste de l’AFP sur place a vu une trentaine de voitures de police partir du commissariat de Hanau et selon des témoins, des policiers munis de mitraillettes ont été déployés dans la ville.

Une première fusillade aurait visé un bar à chicha, le Midnight, au coeur de cette ville d’environ 90.000 habitants. Selon la police, au moins une personne a été grièvement blessée sur ce premier site vers 22H00 (21H00 GMT). Des témoins, cités par des médias locaux, ont rapporté avoir entendu une dizaine de coups de feu.

Le ou les auteurs auraient ensuite quitté en voiture ce premier site en direction de la Kurt-Schumacher Platz, dans le quartier de Kesselstadt, selon la police.

Une seconde fusillade s’est alors produite, qui a fait « au moins cinq blessés graves » d’après le bilan initial des autorités. Selon les médias locaux, trois personnes ont été tuées devant le premier bar à chicha et cinq devant le deuxième, L’Arena Bar.

De nombreux véhicules et ambulances circulaient dans la nuit dans cette ville, a constaté l’AFP.

– Menace –

Le mobile de ces attaques n’était pas encore connu, a précisé un porte-parole de la police.

L’Allemagne a été ciblée ces dernières années par plusieurs attaques jihadistes, dont une avait fait 12 victimes dans le coeur de Berlin en décembre 2016.

Mais c’est la menace d’un terrorisme d’extrême droite qui inquiète le plus les autorités allemandes, depuis notamment le meurtre d’un élu allemand pro-migrants, membre du parti de la chancelière Angela Merkel, en juin dernier.

Vendredi, 12 membres d’un groupuscule d’extrême droite ont été arrêtés dans le cadre d’une vaste enquête antiterroriste. Ils sont soupçonnés d’avoir planifié des attaques de grande ampleur contre des mosquées sur le modèle de l’auteur de l’attaque de Christchurch en Nouvelle-Zélande, qui en mars 2019 avait tué 51 personnes dans deux mosquées en se filmant en direct. Ils ont été placés en détention.

Ces attaques avaient pour but de déclencher des « conditions proches de la guerre civile » et ébranler l’ordre social, selon des sources sécuritaires citées par l’agence DPA.

En octobre, un extrémiste de droite négationniste avait tenté de commettre un attentat dans une synagogue de Halle, un massacre n’étant évité que de justesse. Faute de pouvoir pénétrer dans l’édifice religieux dans lequel les fidèles s’étaient barricadés, il avait abattu une passante et le client d’un restaurant de kébabs, diffusant en direct sur internet ses forfaits.

Son procès est attendu prochainement.

A Dresde, dans l’ex-RDA, huit néonazis sont également jugés depuis près de cinq mois pour avoir planifié des attentats contre des étrangers et des responsables politiques.

L’association Ditib, principale organisation de la communauté turque musulmane d’Allemagne, a réclamé plus de protection pour ses fidèles qui ne « se sentent plus en sécurité ».

Actuellement, 50 personnes liées à la mouvance d’extrême droite et considérées comme « des dangers pour la sécurité de l’Etat » sont particulièrement surveillées par les services de renseignement.

Coronavirus: plus de 2.100 morts, l’épidémie semble ralentir en Chine

Les nouveaux cas de contamination au coronavirus annoncés par les autorités en Chine ont nettement diminué jeudi, et l’Organisation mondiale de la Santé a salué les « énormes progrès » pour juguler l’épidémie dont le bilan dépasse les 2.100 morts.

Un total de 108 décès supplémentaires ont été recensés jeudi dans la province du Hubei, où l’épidémie de Covid-19 avait démarré en décembre.

Mais seuls 615 nouveaux cas de contamination ont été enregistrés, en fort recul par rapport aux 1.693 rapportés mercredi, selon les autorités sanitaires de la province, qui ont par ailleurs révisé à la baisse, sans préciser pourquoi, le nombre de cas déclarés les jours précédents.

Au Japon, environ 500 passagers ont débarqué mercredi du paquebot Diamond Princess, en quarantaine dans le port de Yokohama, près de Tokyo.

Les autorités japonaises ont annoncé mercredi soir avoir recensé 79 nouveaux porteurs du coronavirus à bord. Avec au moins 621 cas, le navire de croisière est le plus grand foyer du virus hors de Chine.

Les passagers ne présentant pas de symptômes, dont les tests se sont révélés négatifs et qui n’ont pas eu de contact avec des personnes porteuses du virus, ont débarqué après 14 jours de quarantaine au Japon.

« Je suis soulagé (…) Je veux me reposer », a lancé aux journalistes un Japonais de 77 ans.

Les personnes autorisées à sortir ont reçu un certificat officiel indiquant qu’elles ne présentaient « aucun risque d’infection au nouveau coronavirus », ni de symptômes au moment de l’inspection.

Certains au Japon s’inquiètent toutefois de voir des passagers du navire éparpillés dans la nature ou en partance pour leurs pays respectifs.

Les dizaines de nouveaux cas constatés à bord chaque jour ont soulevé des questions sur l’efficacité de la quarantaine au cours de laquelle les passagers étaient autorisés à se promener en petits groupes sur le pont avec des masques, tandis que le personnel de bord passait de cabine en cabine pour distribuer les repas.

Plusieurs pays, dont le Royaume-Uni, ont décidé d’envoyer des avions pour rapatrier leurs ressortissants sans plus attendre. Quant à l’équipage, il entamera une quarantaine une fois le dernier passager sorti.

– La Russie fermée aux Chinois –

L’inquiétude face au virus touche aussi la Russie, où aucun ressortissant chinois ne peut entrer à partir de jeudi, point d’orgue des mesures sanitaires prises contre l’épidémie, malgré le coût économique pour le tourisme et les régions frontalières.

Officiellement, la Russie n’a plus de malades du nouveau coronavirus sur son territoire depuis la sortie d’hôpital la semaine dernière des deux seuls patients, des ressortissants chinois. Moscou avait déjà fermé ses quelque 4.250 km de frontières avec la Chine, coupé les liaisons ferroviaires de passagers et restreint le nombre des vols vers des villes chinoises.

En Ukraine, des dizaines de personnes ont protesté mercredi contre l’arrivée prévue jeudi dans le pays d’un avion transportant 48 Ukrainiens et 29 ressortissants de pays tiers depuis Wuhan. Les manifestants ont bloqué une route menant vers un hôpital à Vynnyky, dans l’ouest du pays.

La France a pour sa part envoyé à Wuhan un nouvel avion en vue de rapatrier « quelques dizaines » de ses ressortissants, a annoncé le ministère de la Santé.

En Chine continentale, le bilan a dépassé jeudi 2.100 morts, avec plus de 74.500 personnes infectées. Le territoire semi-autonome de Hong Kong a constaté un deuxième décès, et l’Iran a annoncé deux morts.

– « Enormes progrès » –

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) s’est félicitée mercredi au Caire des « énormes progrès » effectués dans la gestion de l’épidémie.

« Nous avons fait d’énormes progrès en peu de temps », a affirmé le directeur des mesures d’urgence en Méditerranée orientale, Richard Brennan, lors d’une conférence de presse du bureau régional de l’OMS en Egypte.

« On arrive à diagnostiquer le virus partout maintenant » et des « systèmes sanitaires efficaces » ont été mis en place, s’est félicité de son côté le directeur régional de l’OMS Ahmed al-Mandhari. Toutefois, il est « encore trop tôt pour dire que le virus a été endigué », a nuancé le Dr. Brennan.

Cet optimisme a gagné les principales Bourses mondiales, qui ont terminé mercredi en hausse. « Je ne pense pas que le coronavirus soit encore un sujet important. On voit que le nombre de nouveaux cas diminue. Le pire est probablement passé », a commenté l’analyste Maris Ogg, de Tower Bridge Advisors.

La Chine a donné cinq jours mercredi à trois journalistes du Wall Street Journal pour quitter le pays en représailles à un titre jugé raciste du quotidien américain. Pékin a très mal pris une tribune parue le 3 février, titrée: « La Chine est le véritable homme malade de l’Asie ». Cette expulsion a été immédatement condamnée par Washington.

Algérie: le jour du début de la contestation décrété « Journée nationale »

Le jour du début en Algérie de la contestation contre le pouvoir a été décrété « Journée nationale » par le président Abdelmadjid Tebboune, à l’occasion du premier anniversaire de ce mouvement populaire inédit déclenché le 22 février 2019.

La présidence a annoncé, dans un communiqué cité par la télévision d’Etat, que « M. Tebboune a décrété mercredi (…) le 22 février de chaque année ‘Journée nationale’ de la fraternité et de la cohésion entre le peuple et son armée ».

Le 22 février 2019, des millions d’Algériens sont descendus dans les rues de toutes les grandes villes du pays pour exprimer leur rejet d’un 5e mandat de l’ex-président Abdelaziz Bouteflika.

Ce mouvement populaire -ou « Hirak »- a obtenu la démission de M. Bouteflika début avril 2019, mais continue de réclamer une véritable rupture avec le système politique en place depuis l’indépendance du pays en 1962.

Ancien cadre de la présidence Bouteflika et pur produit du « système », M. Tebboune qui s’efforce de s’attirer les bonnes grâces de la contestation, a été élu le 12 décembre dernier lors d’un scrutin boycotté par la majorité des Algériens.

« Le décret présidentiel stipule que la journée du 22 février immortalisera le sursaut historique du peuple et sera célébrée dans l’ensemble du territoire national, à travers des manifestations et des activités à même de renforcer les liens de fraternité et de cohésion nationales », selon le communiqué.

Ethiopie: le TPLF, ex-parti dominant, fête ses 45 ans dans l’incertitude

Le parti qui a dominé la politique éthiopienne pendant près de trois décennies avant l’arrivée au pouvoir du Premier ministre Abiy Ahmed a fêté mercredi ses 45 ans avec une cérémonie qui a mis en exergue les tiraillements l’opposant au pouvoir central et à l’Érythrée.

Le Front de libération des peuples du Tigré (TPLF) a dominé la coalition qui a renversé en 1991 le régime militaro-marxiste du Derg, dirigé par le dictateur Mengistu Haile Mariam, et ensuite exercé un contrôle étroit sur l’Éthiopie pendant presque 30 ans.

Les Tigréens, qui ne constituent plus que 6% de la population, ont ainsi longtemps disposé d’un pouvoir sans commune mesure avec leur importance numérique.

Mais ce parti a vu son influence décroître avec l’émergence de M. Abiy, entré en fonction en avril 2018 après plusieurs mois de manifestations antigouvernementales reflétant une frustration générale contre l’exercice du pouvoir par le TPLF.

Craignant d’être encore plus marginalisé, le TPLF a refusé en novembre de fusionner la coalition au pouvoir en un seul parti, contrairement aux trois autres partis qui la formait, se positionnant ainsi de fait dans l’opposition.

Le parti contrôle en revanche toujours fermement la région septentrionale du Tigré. Mercredi, des dizaines de milliers de ses partisans ont envahi les rues de la capitale régionale, Mekele, pour une parade d’inspiration militaire des forces de sécurité locales.

Cet événement marquait le 45e anniversaire du parti, fondé en 1975. Les participants ont entonné des chants guerriers et marché dans des formations représentant les contours du Tigré et de l’Éthiopie.

Dans un discours, le président du TPLF, Debretsion Gebremichael, a accusé M. Abiy, prix Nobel de la paix 2019, de minimiser l’importance de ce que le parti a accompli pour consolider son propre pouvoir.

Contrairement au chef du gouvernement, les Éthiopiens respectent le TPLF, a estimé M. Debretsion, estimant que « la maladie est dans les dirigeants, pas dans le peuple ».

Yemane Amha, un ancien combattant du TPLF âgé de 44 ans, a estimé pour l’AFP que cet anniversaire intervenait à un « moment crucial » pour le parti.

« Je pense, comme probablement la plupart des Tigréens, que nous sommes à un tournant, où nous pouvons soit aller de l’avant en acceptant nos différences, ou alors où le gouvernement fédéral continue d’imposer sa volonté au peuple du Tigré et au-delà », a-t-il évoqué.

Le TPLF était au pouvoir au moment du conflit meurtrier ayant opposé l’Éthiopie à l’Érythrée entre 1998 et 2000, qui avait fait environ 80.000 morts.

M. Abiy s’est vu attribuer le prix Nobel de la paix 2019 principalement pour la réconciliation menée tambour battant avec l’Érythrée, qui a permis de mettre fin à 20 ans d’état de guerre entre les deux pays.

Mais cette paix reste fragile, les postes-frontières brièvement rouverts après la signature d’un accord de paix en juillet 2018 restant fermés, et aucun progrès n’ayant été enregistré sur la démarcation de la frontière, qui jouxte pour l’essentiel le Tigré.

Une animosité historique continue d’opposer le TPLF au président érythréen, Issaias Afeworki. Dans une interview télévisée au début du mois, ce dernier a accusé la « petite clique » du TPLF de tenter de saboter la paix et le programme de réformes de M. Abiy.

Fissehatsion Gebremichael, un fonctionnaire, a vu dans cet anniversaire un moyen de résister à la « marginalisation » des Tigréens. « Les gens se sont rassemblés contre ce qu’ils perçoivent comme une menace à leur encontre », a-t-il expliqué.

« Beaucoup de Tigréens considèrent qu’il y a un complot organisé entre les forces dirigeantes ici (en Ethiopie) et des forces étrangères », a-t-il ajouté, estimant que les tensions risquaient d’encore augmenter à l’approche des élections générales du 29 août.

Les violences communautaires n’ont cessé de marquer le début de mandat de M. Abiy, qui met en cause « les tensions communautaires créées dans le pays par les partis +ethno-nationalistes+ dans leurs régions respectives ».

Burundi: le président Nkurunziza nommé « guide suprême du patriotisme »

L’Assemblée nationale du Burundi a adopté mercredi un projet de loi qui élève au rang de « guide suprême du patriotisme » le président Pierre Nkurunziza, lequel a décidé de ne pas se représenter à l’élection présidentielle du 20 mai.

Ce texte, présenté par la ministre de la Justice, Aimée-Laurentine Kanyana, a été adopté par « 91 voix pour, 4 contre et 13 abstentions », a annoncé le président de l’Assemblée nationale, Pascal Nyabenda, à l’issue du vote.

Il institue également « une journée nationale du patriotisme organisée chaque année au mois de juillet et présidée par le Guide suprême du patriotisme ».

M. Nkurunziza sera à l’avenir consulté à ce titre « sur des questions relatives à la sauvegarde de l’indépendance nationale, à la consolidation du patriotisme et à l’unité nationale », précise ce texte.

Il prévoit aussi, à côté de la retraite dorée à laquelle il aura droit, des « mesures d’accompagnement » qui doivent lui permettre de mener à bien sa mission.

L’Assemblée avait adopté en janvier un projet de loi octroyant au président Nkurunziza de très nombreux avantages à la fin de son mandat: une villa de « très haut standing », une allocation d’environ 500.000 euros et pour le reste de sa vie une indemnité égale aux émoluments d’un député.

Ces avantages, dans un pays où 75% de la population vit en-dessous du seuil de pauvreté, avaient été qualifiés d’ »indécents » par l’opposition.

Le député d’opposition Fabien Banciryanino a déclaré à l’AFP avoir voté contre le texte présenté mercredi et s’en être expliqué devant l’Assemblée.

« J’ai expliqué que depuis qu’il est au pouvoir, des crimes graves ont été commis, on retrouve chaque semaine des corps de personnes tuées, le pays est devenu l’un des plus pauvres et des plus corrompus au monde (…). Je pense qu’il devrait plutôt répondre de tous ces actes devant la justice », a-t-il indiqué.

Le Burundi est en crise depuis que le président Nkurunziza a annoncé en avril 2015 sa candidature à un troisième mandat controversé. Il a été réélu en juillet de la même année.

Les violences et la répression qui ont accompagné la crise auraient fait au moins 1.200 morts et déplacé plus de 400.000 personnes entre avril 2015 et mai 2017, selon les estimations de la Cour pénale internationale, qui a ouvert une enquête.

Au pouvoir depuis 2005, M. Nkurunziza a surpris en annonçant en juin 2018 qu’il ne se présenterait pas à sa succession en 2020, alors que la nouvelle Constitution modifiée par référendum le lui permettait.

Le parti au pouvoir, le CNDD-FDD, a choisi pour tenter de lui succéder l’un de ses proches, le général Evariste Ndayishimiye.

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Suède: l’enquête sur l’assassinat du Premier ministre Olof Palme va s’achever

Plus de trente ans après l’assassinat du Premier ministre suédois Olof Palme, l’enquête, dans l’impasse malgré les pistes innombrables explorées depuis 1986, est en passe de se terminer, ont déclaré mercredi les autorités suédoises.

D’ici fin juin, le parquet va « soit engager des poursuites, soit clore l’enquête », a annoncé à l’AFP Krister Petersson, le procureur chargé de l’affaire.

Dirigeant social-démocrate charismatique, Olof Palme a été froidement abattu sur un trottoir gelé du centre de Stockholm le 28 février 1986, à l’âge de 59 ans, alors qu’il rentrait à pied du cinéma avec sa femme, sans gardes du corps.

Son meurtrier avait réussi à prendre la fuite, emportant avec lui l’arme du crime, qui n’a jamais été retrouvée.

L’affaire reste à ce jour non élucidée.

À l’occasion du 30ème anniversaire de la mort du chef du gouvernement, l’actuel Premier ministre Stefan Löfven avait parlé d’une « plaie ouverte ».

« Je pense que le pays entier, et bien sûr la famille, veulent voir une conclusion », a déclaré le Premier ministre mercredi au journal Aftonbladet. « Nous la recherchons depuis si longtemps », a-t-il ajouté.

Des milliers de personnes ont été entendues, des dizaines d’autres ont revendiqué l’acte et le dossier occupe 250 mètres d’étagères.

Au fil des années, les enquêteurs ont soupçonné tantôt le PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan, considéré comme une organisation terroriste par Ankara, les Etats-Unis et l’Union européenne notamment), l’armée suédoise ou la police, voire les services secrets sud-africains.

– Décès du principal suspect –

Selon Krister Petersson, en charge du dossier depuis 2017, le décès du principal suspect pourrait notamment justifier un abandon de l’enquête, car selon la loi suédoise, une personne décédée ne peut pas être inculpée.

Homonyme du magistrat, Christer Pettersson, identifié par la femme d’Olof Palme, avait été déclaré coupable en juillet 1989 avant d’être relaxé en appel quelques mois plus tard, pour insuffisance de preuves. Son témoignage avait aussi été fragilisé par les conditions, entachées d’irrégularités, dans lesquelles il avait été recueilli.

Mais cet alcoolique toxicomane déjà condamné pour meurtre, qui s’était un temps vanté de l’assassinat du dirigeant avant de se rétracter, est mort subitement en 2004, emportant son secret dans la tombe.

Cependant, même si l’enquête est close, elle pourrait être rouverte à l’avenir si de nouveaux éléments apparaissaient, a précisé le magistrat.

Avocat du droit des peuples à l’autodétermination, pourfendeur de l’interventionnisme américain en Amérique du Sud et de l’Apartheid sud-africain, Olof Palme s’était fait beaucoup d’ennemis à l’étranger mais aussi en Suède où des cercles de l’armée voyaient en lui un pion de l’Union soviétique.

Vladimir Poutine pris à partie sur son salaire par une habitante

Le président russe Vladimir Poutine a été pris à partie sur son salaire mercredi par une habitante de Saint-Pétersbourg (nord-ouest), sa ville natale, au moment où la Russie cherche à raviver son économie anémique.

Une femme affirmant souffrir d’un handicap et d’un œdème cérébral a interpellé le maître du Kremlin à l’issue d’une cérémonie commémorative dans l’ancienne capitale impériale russe, et lui a demandé s’il était possible, selon lui, de vivre en Russie avec un revenu mensuel de 10.800 roubles (environ 157 euros).

« Je pense que c’est très difficile », a concédé M. Poutine, dont le salaire mensuel dépasse les 770.000 roubles (11.215 euros), selon les informations officielles.

Le minimum vital, c’est-à-dire la somme considérée comme indispensable par les autorités, est actuellement d’environ 11.300 roubles (164 euros) pour Saint-Pétersbourg.

« Votre salaire atteint probablement les 800.000 roubles », a lancé la femme, interpellant le président sur le prix du loyer, les achats du quotien, les prix etc, insinuant que le chef de l’Etat devait être étranger aux problèmes rencontrés par les personnes défavorisées.

« Le président n’a pas le salaire le plus élevé » dans le pays, a rétorqué M. Poutine, avant de rappeler qu’une série de mesures visant à augmenter les allocations sociales en Russie et améliorer le niveau de vie des Russes devaient être mises en place prochainement.

« L’Etat fait tout ce qu’il est en mesure de faire », a assuré le président russe.

Vladimir Poutine a créé la surprise en janvier en proposant une réforme constitutionnelle qui s’est accompagnée de la démission du gouvernement et de la désignation d’un nouveau Premier ministre, Mikhaïl Michoustine.

Ce dernier s’est engagé, lors de sa nomination, à ce que les Russes bénéficient de « réels changements pour le meilleur », et ce alors que l’économie russe peine à se redresser depuis le début de la crise en 2014, provoquée par les sanctions économiques occidentales et la chute des cours du pétrole.

Les Irakiennes défilent sans les hommes dans la Sainte Najaf, une première

« Non à l’Amérique », « Non à l’Iran », « qu’on les arrache tous par la racine! » Les slogans sont les mêmes qu’ailleurs en Irak, mais cette fois-ci, dans la très conservatrice ville sainte chiite de Najaf, les voix qui les portent sont uniquement féminines.

Mercredi, des centaines de femmes de toutes les générations ont défilé dans cette ville au sud de Bagdad dénonçant pêle-mêle la corruption, endémique en Irak, les jeux d’influence des Etats-Unis et de l’Iran, grands alliés de Bagdad, et le leader chiite Moqtada Sadr qui a récemment retiré son soutien aux manifestants.

« Aucune voix ne peut couvrir celle des femmes », proclame d’emblée une pancarte, alors qu’une première manifestation uniquement de femmes a eu lieu il y a une semaine à Bagdad pour dénoncer les propos de Moqtada Sadr contre la mixité dans les défilés.

« On a commencé à manifester pour faire chuter le régime, maintenant on fait des manifestations uniquement de femmes parce qu’ils nous ont insultées », explique à l’AFP Saba, 22 ans qui marche en direction du Conseil provincial où se trouve le campement des antipouvoir.

Nada Qassem, professeure d’université d’une cinquantaine d’années, a elle aussi des griefs contre l’ancien chef de milice qui a été le premier à soutenir la révolte inédite mais a ensuite envoyé ses hommes démonter les piquets de grève dénonçant des manifestants buvant de l’alcool, se droguant et promouvant la débauche.

« Nous, on est libres, on ne sort pas sur ordre d’un religieux et on ne s’arrête pas à cause d’un décret », lance cette Irakienne qui a elle-même été blessée dans des affrontements avec les sadristes.

Autour d’elle, détournant le slogan phare de la révolte emprunté à Moqtada Sadr –« qu’on les arrache tous par la racine »– les manifestantes scandent: « qu’on les arrache tous par la racine, même celui qui a dit ça ».

Les près de 550 morts et 30.000 blessés, la campagne d’intimidations –assassinats de militants, enlèvements de manifestants et violences– menée selon l’ONU par des « milices », tout cela, assure-t-elle à l’AFP, ne l’arrêtera pas.

« Je veux un Etat civil et reprendre mes droits volés », affirme cette Irakienne drapée dans un grand voile noir. « Ce pays est dirigé depuis l’étranger », dénonce-t-elle encore, en référence à la mainmise iranienne sur le pouvoir à Bagdad et aux interventions américaines en Irak.

Les tensions entre les deux ennemis ont même dégénéré début janvier en attaques meurtrières qui ont fait redouter que l’Irak ne plonge dans un nouveau conflit.